17.3.09

Objection chrétienne aux droits de l'homme

Sur le blog de madame de Charbinières un commentateur m'objecte les arguments de Jean-Marc Berthoud "Une religion sans Dieu, les Droits de l'homme contre l'évangile". Paris l'Age d'homme, 1993.

Voici le résumé qu'en fait "Falk" :

Or, comme l'écrit très bien Jean-Marc Berthoud, l’étude de la Bible permet de révéler les points suivants qui démontrent l’incompatibilité absolue entre l’idéologie des Droits de l’Homme et la pensée chrétienne.

- 1. L’idéologie des Droits de l’Homme est fondée sur une vision faussement optimiste de l’homme. La seule affirmation des Droits de l’Homme serait, dans cette perspective optimiste, suffisante pour établir et maintenir la justice sociale. La Bible nous présente, malgré son affirmation de la bonté originelle de la création et l’espérance de la rédemption, une vision beaucoup plus sombre de la nature humaine et du monde présent. La bonté originelle parfaite de la création de Dieu a été blessée par la faute du premier homme. Depuis la chute, l’homme est dégradé de sa perfection originelle et le monde corrompu. Dans une telle situation la seule affirmation de ses droits abstraits et absolus conduira immanquablement l’homme à en abuser.

Dans la situation de corruption consécutive au péché originel nous n'en restons pas moins créés à l'image de Dieu. Ce n'est pas parce que l'on peut abuser de quelque chose que cette chose est mauvaise en soi. A ce compte, il ne faudrait plus rien faire. Il ne faudrait même plus agir, ni boire, ni manger puisque nous sommes mauvais et que nous pouvons abuser de tout. Il n'est pas vrai que du moment que nous pouvons abuser de quelque chose, il ne faut pas en user.


-2. La conséquence de cette perspective réaliste va de soi. Nous ne trouvons dans la Bible aucune affirmation des Droits de l’Homme en tant que tels. Nous ne pouvons y trouver, ni la notion idéologique des droits théoriques, ni celle d’un homme conçu comme atome individuel, séparé de Dieu, de ses semblables et de l’ordre de la création. A la place de tels droits entièrement théoriques, nous trouvons une liste précise des devoirs des hommes envers Dieu et envers leur prochain, devoirs résumés dans les Dix Commandements et détaillés dans les lois contenues dans la Bible tout entière. La Bible tout entière ne doit-elle pas être considérée comme Loi ?
Il est faux d’affirmer que la contrepartie automatique de ces devoirs bibliques serait une liste des Droits de l’Homme. La loi de Dieu définit de façon exacte et détaillée la différence entre le bien et le mal. C’est en conséquence cette loi, et cette loi seule, qui doit déterminer notre attitude envers ce qui est bien et ce qui est mal. Il ne s’agit jamais dans la Bible du droit que nous aurions à revendiquer ce qui nous paraît bien ou à repousser ce qui nous paraît mal. Il s’agit toujours de notre devoir, de notre obligation, du commandement qui nous est fait de résister au mal - Ayez le mal en horreur (Romains XII, 13) - et d’aimer et d’obéir au bien - Attachez vous fortement au bien (Romains, XII,9). Le problème fondamental est celui d’un homme foncièrement pécheur, toujours tenté de réclamer abusivement des droits qui ne sont pas les siens. Il faut, en conséquence, limiter sa convoitise et diriger son attention vers ses devoirs.

Sed contra :

Mc 2,23. Il arriva encore que, le Seigneur passant le long des blés un jour de sabbat, Ses disciples se mirent, chemin faisant, à arracher des épis.

Mc 2,24. Et les pharisiens Lui disaient: Voyez, pourquoi font-ils, le jour du sabbat, ce qui n'est pas permis?

Mc 2,25. Il leur dit: N'avez-vous jamais lu ce que fit David lorsqu'il fut dans le besoin, et qu'il eut faim, lui et ceux qui l'accompagnaient;

Mc 2,26. comment il entra dans la maison de Dieu, au temps du grand prêtre Abiathar, et mangea les pains de proposition, qu'il n'était permis qu'aux prêtres de manger, et en donna à ceux qui étaient avec lui?

Mc 2,27. Il leur disait encore: Le sabbat a été fait pour l'homme, et non pas l'homme pour le sabbat.



Jésus passe son temps à défendre ses disciples.

Il défend même Marie-Madeleine, une femme richissime qui avait acheté du parfum pour lui. Certains disaient : on aurait pu donner aux pauvres avec le prix de ce parfum. et il répond "Pourquoi faites-vous de la peine à cette femme ?" (Mth, 26, 10)

Il défend son droit de propriété et son droit à répandre du parfum sur la tête de Jésus. Son droit à faire le bien sans tenir compte du jugement mauvais des autres.

Je ne vais pas citer tout l'évangile qui est souvent consacré aux droits de l'homme sans que s'y trouve l'expression.

- 3. Tous les droits appartiennent au Créateur. En conséquence tout ce qui nous vient de Lui doit être accepté dans un esprit de reconnaissance comme étant des grâces, qu’il s’agisse de notre vie, de nos circonstances, du cadre fixe de l’ordre de la création, de la loi divine, de la Révélation et, évidemment du salut lui-même. Nous sommes en conséquence exhortés, non à réclamer nos droits pour tout, mais à rendre grâce pour toutes choses.

Bien sûr tous les droits appartiennent au Créateur, mais Il nous en confère et malheur à celui qui ne les respecte pas ! Nous devons rendre grâce pour nos droits. Il a le droit de nous conférer des droits à tous égalitairement et personne ne peut nous en priver sans violer la volonté divine.

- 4. La revendiction de ses droits manifeste une attitude où l’homme prétend que tout lui serait dû. L’homme imagine qu’il mérite que l’on satisfasse certains droits et il les réclame. Cette attitude de revendication est au fond une attitude de commandement ; ce commandement appartient à Dieu seul. Ce fut une telle attitude revendicatrice de la part de nos premiers parents - Donne moi le droit d’être comme Dieu - qui fut la cause de la chute de l’humanité. Cette attitude de revendication de ses droits est une infraction flagrante au Xe commandement qui nous interdit toute convoitise. La réclamation universelle des Droits de l’Homme est une incitation universelle à la convoitise.

Berhoud confond ici (et ailleurs aussi) la revendication des droits et l'existence des droits. Ce qui est bien distinct. Mais le pire, c'est que dans le paragraphe ci-dessus, il utilse le dixième commandement en lui faisant dire l'inverse de ce qu'il dit. Le dixième commandement nous interdit de convoiter, les droits des autres sur leurs femmes, sur leurs propriétés. Il nous défend cela jusque dans notre âme. Il nous demande de respecter les droits de l'homme jusque dans nos pensées, c'est le dixième commandement.

- 5. Le Nouveau Testament, avec les apôtres Pierre, Paul et Jean nous fournit une définition précise de cette attitude de revendication. Il l’appelle la convoitise de la chair (Rom. 13: 14 ; Eph. 2:3 ; I Pi 2:11 ; 2 Pi 2:18 ; I Jn 2:16). Il s’agit avant tout de défendre et d’accroître la revendication des droits de notre moi au libre épanouissement. La Bible tout entière nous enseigne que le développement du moi pécheur, charnel, égoïste n’est que croissance dans le péché. La loi nous a été donnée, entre autres, pour brider ce moi et la croix du Christ a pour but de le faire mourir. En tant que chrétien ce n’est pas mon MOI qui doit s’épanouir. Je dois renoncer à moi-même, même mourir à moi-même afin que le Christ vive en moi, qu’il grandisse en moi. La revendication des Droits de l’Homme est ainsi en contradiction radicale avec l’oeuvre et la prédication de la croix de Jésus-Christ. De sorte qu’être partisan des Droits de l’Homme n’est pas autre chose qu’être ennemi de la croix du Christ, avoir pour dieu son ventre, c’est-à-dire la satisfaction de ses propres convoitises. (…)

Faudra-t-il se suicider par la faim, la soif et le froid pour être chrétien ? La résignation à la volonté du Seigneur, si elle est telle, n'interdit pas d'avoir des droits. Nous nous résignons au mystère de la croix. Si on me vole mes biens, celui qui en est l'auteur viole mes droits, mais si sons coup réussit, c'est que le Seigneur aura décidé de m'en priver. Cela est valable pour moi, pour mon âme, jamais pour les autres. Je peux renoncer à mes droits mais je ne peux pas priver les autres des leurs. Ne confondons pas les plans. Le mystère de la croix qui est très souvent consécutif à la violation des droits n'est pas une invitation à violer les droits d'autrui ou à renoncer à ses droits. Jésus lui-même ne renonce pas absolument à ses droits.

Mt 27,46. Et vers la neuvième heure, Jésus cria d'une voix forte: Eli, Eli, lamma sabacthani? C'est-à-dire: Mon Dieu, Mon Dieu, pourquoi M'avez-vous abandonné?

Ce qui signifie : mon Dieu pourquoi n'avez-vous pas fait respecter mes droits ? Il fait aussi respecter le droit à l'intégrité physique du policier ("serviteur du grand prêtre venu l'arrêter lorsque saint Pierre lui donne un coup d'épée et lui tranche l'oreille. (Jean 18, 10), il recole l'oreille de celui qui vient porter l'arrêter.

- 6. La réclamation de nos droits est signe de notre orgueil et le chemin de l’enfer dans ce monde comme dans le monde à venir, tandis que le souci des droits de Dieu, c’est-à-dire le souci de se soumettre à sa souveraineté et d’obéir à ses commandements, est signe d’humilité et conduit à ce que le règne de Dieu vienne sur la terre comme au ciel. La revendication par des chrétiens des Droits de l’Homme est un signe manifeste de leur apostasie…”

Je crois avoir démontré l'inverse. Il n'y a pas d'antinomie entre droit du Seigneur et droit de l'homme, au contraire, Dieu confère des droits et commande tout au long de l'évangile que nous les respections (les nôtres et ceux des autres). Le mystère de la croix ne dit rien contre cela.

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