1.12.12

Le "mariage" homosexuel prôné par l'abbé Meslier (1664 - 1729)

L'abbé Meslier (1664-1728) fut un curé de campagne français. Il écrivit en secret durant sa vie un "Testament" dans lequel il se déclarait athée et se déchaînait contre les institutions françaises. Il avait été un lecteur admiratif de Descartes. Son Testament n'est pas dépourvu de qualité littéraire et plaide en faveur de la formation intellectuelle des ecclésiastiques français du XVIIIe siècle. Il était cultivé et d'esprit libre (j'ai écrit "esprit libre", j'aurais dû ajouter, reprenant Pascal , "jusqu'à un certain degré seulement").

Chafarevich dans son ouvrage "Le phénomène socialiste" prétend qu'il s'est suicidé. Ce n'est pas absolument certain. Il est mort de n'avoir plus mangé. Etait-ce une maladie physique, une anorexie mentale, une dépression nerveuse, un suicide parfaitement conscient ? Je n'aurais garde de trancher.

Voici un extrait de ce qu'il écrivait du mariage catholique et français (p. 226 de son "Testament", œuvre posthume) :

« Pareillement, si les hommes, particulièrement nos Christicoles [lire chrétiens], ne rendaient pas, comme ils le font, les mariages indissolubles entr’eux, et si, au contraire, ils laissaient toujours également la liberté aux hommes et aux femmes de se joindre indifféremment ensemble, chacun suivant son inclination, comme aussi la liberté de se quitter et de se séparer les uns les autres, lorsqu’ils ne se trouveraient pas bien ensemble, ou lorsque leur inclination les porterait à former quelque autre nouvelle alliance, on ne verrait certainement point tant de mauvais mariages, ni tant de mauvais ménages, qu’il y a entr’eux ; il n’y aurait point tant de discorde et de dissention, qu’il y en a entre les maris et les femmes. Ils n’auraient que faire d’en venir aux injures, ni aux emportements, les uns contre les autres, comme ils font si souvent ; il n’auraient que faire de se maltraiter les uns les autres, ni de se maudire, ni de se déchirer avec tant de fureur, comme il font les un les autres, parce qu’ils pourraient librement se quitter, du moment qu’ils cesseraient de s’aimer ou de se plaire ensemble, et qu’ils pourraient librement chercher leur contentement. En un mot, il n’y aurait point de maris malheureux, ni de femmes malheureuses, comme il y en a tant, qui sont tout leur vie misérables, sous joug fatal d’un mariage indissoluble ; au contraire ils auraient toujours agréablement et paisiblement les uns les autres leurs plaisirs et leurs contentements ensemble, parce que ce serait pour lors toujours la bonne amitié, qui serait le principe ou le motif principal de leur union conjugale, ce qui serait un très grand bien pour eux, aussi bien que pour les enfants qui en proviendraient, parce qu’ils ne seraient pas comme tant de pauvres enfants, qui demeurent orphelins de père ou de mère, et souvent de l’un et de l’autre tout ensemble, et qui, pour ce sujet, sont comme abandonnés d’un chacun, et lesquels on voit souvent malheureux sous les lois et l’autorité de quelques brutaux beau-père, ou de quelques mauvaises belles-mères, qui les font jeûner et qui les maltraitent de coups, ou sous la conduite de quelques tuteurs ou curateurs, qui les négligent et qui mangent ou dissipent mal à propos leurs biens. (…) »


(Livre trouvé sur google books)

On ne voit pas trop le rapport entre le malheur des orphelins (qui bénéficiaient d'un tuteur) et l'institution du mariage… A moins qu'ils ne veuillent tout simplement signifier que la fin du mariage signifiera également la fin de la filiation. Sans filiation… il n'y aura plus d'orphelin.

D'autre part notre auteur plaide pour les séparations qui résoudraient, selon lui, le problème des mésententes conjugales. Or l'histoire du divorce et du concubinage prouvent surabondamment que le divorce de résout pas du tout ce genre de problèmes. Les journaux sont pleins des récits de crimes, suicides et abandons d'enfants volontaires ou involontaires (par le père en particulier) dus aux séparations et aux remariages.

Si on lit d'ailleurs le texte plus attentivement on s'aperçoit que l'abbé cartésien, athée et communiste Meslier prône non pas le mariage, même assorti de la possibilité de divorce, mais l'union indéterminée des hommes et des femmes au hasard et en nombre et sexes indéterminés (il n'ose insister, mais son texte peut être compris comme cela). Une idée analogue se trouve dans le "Du Contrat social" de Rousseau lorsque l'auteur imagine un état pré-contractuel, où les enfants naissaient d'humains se rencontrant au hasard comme les chiens, avec femelles mettant bas seules et abandonnant à leur tour leurs progénitures (alors que le phénomène humain est un phénomène culturel vécu en commun, supposant la société dont le mariage est le premier exemple et reste le modèle, voir sur ce point Gaudium et spes et l'expérience et l'histoire).

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