Dans son "Dictionnaire de la culture juridique" (PUF 2003), publié sous la direction de MM. Denis Alland et Stéphane Rials, l'auteur de la rubrique "Ordre public" dit que la notion d'ordre public apparaît dans l'article 6 du Code civil (1804).
J'ai pourtant trouvé cette notion dans Bossuet (mort en 1704).
« Cette belle distinction [des affaires religieuses des affaires politiques ] porta dans les esprits une lumiere si claire, que jamais les chrétiens ne cessèrent de respecter l’image de Dieu dans les princes persécuteurs de la vérité. Ce caractere de soumission reluit tellement dans toutes leurs apologies, qu’elles inspirent encore aujourd’hui à ceux qui les lisent l’amour de l’ordre public (…) »
Pour Bossuet la distinction des ordre religieux et politique est d'ordre public et doit nous inspirer de l'amour. Ce n'est donc pas en 1804 que la notion d'"ordre public" voit le jour.
On pourrait sans doute écrire une histoire du droit du XIXème siècle vu sous cet aspect. Depuis la conquête de l'Algérie, le sénatus-consulte de 1865, l'ordre public irrationnel, donc injuste, envahit petit à petit la sphère juridique française, sous l'influence d'auteurs comme Jean-Jacques Rousseau, Frédéric Nietzsche, ainsi que sous l'influence du positivisme juridique (Duguit, Hauriou) et de la chariah en usage en Algérie conquise par la France à partir de 1830. Mais, la réalité n'étant jamais univoque, l'émergence des instruments juridiques surtout internationaux, sous l'influence notamment de René Cassin et de sa Déclaration universelle des droits de l'homme, vont constituer un antidote. C'est en ces instruments que l'on (re)trouve l'ordre public juste. Il faut donc les lire et les étudier, tout en gardant à l'esprit que cet ordre public mondial a toujours besoin d'être défendu et amélioré et qu'il doit informer l'ordre juridique interne.
En 1865, les juifs d'Algérie ont adhéré librement et massivement à l'ordre public français en abandonnant leur statut coutumier (ce qu'on refusé de faire la quasi-unanimité des musulmans pour des raisons qu'a expliquées le bienheureux père de Foucault dans sa célèbre lettre du 29 juillet 1916 à René Bazin). En 1870, le décret du 24 octobre 1870 supprime la condition de demande et d'acceptation pour les "israélites" qui sont français d'office et d'office soumis à l'ordre public français, même si, par hypothèse, ils ne l'ont pas demandé. Dans les années 40 du XXème siècle, René Cassin, un juif, vient rappeler au monde et à la France qu'il existe un ordre public qui libère l'humanité. On pourrait écrire que ce sont des juifs qui sauveront la France du relativisme, du positivisme, de l'islamisme et lui rappelleront sa culture chrétienne…
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