En réalité cette affaire n'est pas religieuse. C'est une affaire de droits de l'homme. La liberté n'est pas une "permission" (selon l'expression, selon moi malheureuse, du doyen Favoreux), c'est un droit inhérent à l'homme créature raisonnable capable de vérité, opposable à tous. C'est encore moins une notion de philosophie étrangère au droit, c'est un droit naturel et par conséquent respectable, même s'il n'est pas respecté.
Libération a publié samedi 16 juillet 2011 un article intitulé « Tous en cène ». Les réactions qui nous parviennent sont légitimement consternées.
Elles proviennent aussi de personnes qui ne sont pas de foi chrétienne, ce qui est hautement significatif. Quel courage immense de compter sur notre légendaire « bonhomie pardonnante » pour rédiger, à l'encontre du cœur de notre foi, des lignes inqualifiables.
La liberté d'expression s'honore quand elle respecte ceux qu'elle offense.
Ce droit est d'ailleurs reconnu par le droit positif et mis en application par le Conseil constitutionnel et par lui par toutes les juridictions (très théoriquement bien sûr, car la France judiciaire n'est à l'évidence pas un État de droit).
Quand la liberté d'expression entre en conflit avec un autre droit, cela se règle par la notion d'abus de droit (selon l'article 17 de la Convention européenne des droits de l'homme du 4 novembre 1950), ou plus exactement par la condamnation de l'utilisation d'un droit de l'homme pour en violer un autre, ce qui fait que le contrevenant se trouve en dehors du droit (article 30 de la Déclaration de 1948). Non parce qu'il "abuse de son droit", mais parce qu'il n'a aucun droit à violer un droit en en invoquant mensongèrement un autre, un écrivain ou un journaliste se met en dehors du droit et se ravale au rang des malfaiteurs.
Il n'y a pas de liberté d'expression contre la liberté religieuse, il n'y a pas de liberté religieuse contre la liberté d'expression. L'homme est un animal raisonnable capable de vérité. Ainsi on ne peut se moquer des croyants, mais on ne peut interdire les critiques rationnelles des religions.
Esthétiquement, je me délecte toujours de l'article 30 de la Déclaration universelle des droits de l'homme :
"Aucune disposition de la présente Déclaration ne peut être interprétée comme impliquant pour un Etat, un groupement ou un individu un droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits et libertés qui y sont énoncés."
C'est pourquoi la dernière phrase du communiqué est inadmissible juridiquement au moins :
La liberté d'expression s'honore quand elle respecte ceux qu'elle offense.
Bien sûr, le délinquant garde sa dignité d'homme, mais la liberté d'expression ne peut "respecter" un droit qui lui est contraire. En revanche, il peut être opportun de tolérer un mal.
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