20.11.16

Bien commun selon le cardinal Angelo Scola



Dans cet exposé de 2012, exposé très dense, le cardinal reprend principalement les idées de Maritain sur le bien commun dans une société pluraliste.

Il part du constat que les sociétés actuelles ne sont plus fondées et ne peuvent plus être fondées sur les récits historiques qui fondaient le bien commun, selon lui, de, si je comprends bien, la nation. Le bien commun étant maintenant mondial.

Il faut donc retrouver un autre fondement au bien commun. Le cardinal pense que ce fondement se trouve dans l'expérience universelle de l'homme dans l'univers. "Et moi, qu'est-ce que je suis ?" (« Ed io chè sono ? ») se demande le berger kirghize dans le poème de Leopardi (poète romantique italien).

Cette expérience nous fait constater que l'homme est à la fois un être à la destinée qui ne s'accomplit pas dans ce monde d'une part (dignité) et qu'il est d'autre part un être en relation avec un humain (nature sociale de l'homme). Relation d'abord avec la mère, relation duale. Puis relation avec le père qui introduit l'enfant dans la réalité de la relation avec l'autre que la mère, relation triale et relation avec les autres en quantité indéfinie, le troisième introduit au principe de réalité. C'est à partir de cette expérience que l'on conclut que le bien commun (par définition social) primaire est la relation. Le fait d'être en bonnes relations est le bien commun, primaire du moins.

C'est dans cet horizon de l'être ensemble qui est le cadre du bien commun secondaire. Ce cadre est le bien commun politique.

Concrètement quel est ce bien commun dans une société où nous n'avons pas les conceptions communes sur l'être humain.

Les pratiques de solidarité d'une part à destination de ceux qui sont en difficulté et le principe de subsidiarité qui est l'expression de la liberté. Le principe de subsidiarité (la société ne doit pas absorber l'individu, ni brimer ses initiatives) n'est pas réductible au bien social en lui-même. Il exprime la liberté de l'individu par rapport à la société. À ce deuxième point de référence du bien commun, la société cède la place à la liberté.

Le cardinal reprend ensuite un exposé de Benoît XVI sur le schéma de la société telle que la conçoit la doctrine sociale de l'Église.

C'est une schéma en forme de croix: sur l'axe vertical à gauche la solidarité, à droite la subsidiarité, en bas le bien commun immanent à la société, en haut le bien commun à l'humanité entière qui est Dieu, la Trinité à laquelle nous sommes tous destinés dès notre conception. Au point d'intersection des deux branches de la croix: la dignité humaine.

Toutes ces notions sont en inter-connection. Elles s'influencent les unes les autres.

La dignité est au centre, elle influence à la fois la solidarité et la subsidiarité. Elle influence aussi le bien commun immanent (justice sociale, vérité du débat démocratique) que le bien commun transcendant que l'on laisse à la liberté religieuse encadrée par l'ordre public.

Le bien commun, bien partagé par tous et chacun est toujours voulu. Car la société est maxime opus rationnis (au plus haut point œuvre de la raison). Ce n'est pas un bien statique et donné une fois pour toutes bien qu'il soit fondé sur des valeurs éternelles (vérité, justice, liberté), il doit s'adapter constamment aux données sociales contingentes et historiques. Ce bien commun transcendant exige que la société ne se ferme jamais à la destinée transcendante de l'être humain, à ce qui nous attend après ce pèlerinage terrestre.

Bien mieux, ce bien commun transcendant qui est les trois personnes divines car la communauté humaine y est ordonnée. Et le bien commun immanent lui-même porte une promesse qui se réalise dans le bien commun incréé. En facilitant la vita buona, le bien commun immanent ouvre au bien commun transcendant.

Ce cadre, le schéma de la croix, est nécessaire pour la société démocratique.

Les institutions devront ainsi garantir à travers le principe de subsidiarité les formes politique du bien commun de l'être ensemble.

Dans une société où les pensées philosophiques sont diverses, le domaine politique doit converger vers une pensée pratique commune. (Maritain discours de 1947 à l'UNESCO).

Des convictions tournées vers l'action. Cela implique d'accepter l'inévitable divergence des opinions philosophiques et religieuses sur la vision substantielle de la vie. Dans ce contexte on pariera que l'on s'entendra concrètement sur ce qu'il y a à faire. Cela ne veut pas dire qu'il faille renoncer à la justification théorique de l'agir pratique. Renoncer à la justification de l'agir pratique c'est du nihilisme. Les sociétés, y compris la société politique, est alors conçue comme "corps de communication sociale". Dans ce cadre, le devoir du chrétien, en raison de sa vision ample de la vie humaine, est de faire part de sa vision anthropologique, sociale, et cosmologique en vue de contribuer au bien qui est le lien social.

C'est la traduction du devoir du chrétien dans une société pluraliste.

Le cardinal conclut que si l'objectif de la société politique est une pensée pratique commune, alors les chrétiens peuvent dire la leur. Dans ce cadre, c'est le droit et même le devoir des chrétiens de dire ce qui leur paraît le meilleur pour la société dans un langage accessible à tous.

Dès lors, la laïcité n'implique pas le silence sur les perspectives eschatologique de la destinée humaine. Sinon les diversités culturelles sont occultées, elles sont privatisées. Nous sommes dans une nuit où tous les chats sont gris. C'est contraire à la liberté d'expression. C'est contraire au bien commun de la société qui consiste aussi à ce que chacune puisse s'exprimer. Car en occultant certaines opinions on prive la société de certains biens. Chacun donne son opinion dans un engagement commun et collaboratif en vue de bien commun.

Par exemple, si je suis profondément convaincu que la famille est fondée sur l'union stable d'un homme et d'une femme, union ouverte à la vie, je dois pouvoir le dire et dois le dire. Cette conviction peut être contestée. Mais elle sera reconnue, au niveau de la société politique, comme une option possible et cette reconnaissance réduira le taux de conflictualité.

Les procédures démocratiques entreront alors en jeu en vue de produire la loi. La proposition sera enregistrée par le législateur qui a le devoir de se conformer à la culture dominante et, le tout naturellement dans le strict respect des droits universels et fondamentaux de l'homme.

Les relations bonnes étant à la base de la vie bonne, des bonnes relations qui sont à la base de maturation personnelle et sociale. Les "bonnes relations" sont à la base de l'éthos. Elles présupposent la réduction du "taux de conflictualité".

Le cardinal se situe dans une sphère tout à fait théorique. Car de fait la plupart des nouvelles lois violent les droits humains fondamentaux (à titre d'exemples: avortement, anti-négationnisme, vol par le moyen du "mariage homosexuel" comme je l'ai démontré sur ce blog...) Plût au ciel que l'on n'ait qu'à s'en tenir à des discussions polies et charitables sur la meilleure loi possible eu égard aux circonstances !

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