La qualité de la viande et la sécurité sanitaire
La pratique de l’abattage rituel constitue également une importante dérogation aux règles relatives à l’hygiène alimentaire. Le règlement (CE) n° 853/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 fixant des règles spécifiques d’hygiène applicables aux denrées alimentaires d’origine animale prévoit en effet que « la trachée et l’œsophage doivent rester intacts lors de la saignée, sauf s’il s’agit d’un abattage selon un rite religieux ».Or, l’impossibilité matérielle de ligaturer l’œsophage d’animaux qui ont été égorgés peut nuire gravement à la salubrité des viandes. En effet, lorsque l’animal est suspendu pour être éviscéré, une souillure massive du bas de la carcasse peut se produire car il y a épanchement de matières stercoraires en provenance de l’estomac qui s’écoulent à travers la section béante de l’œsophage.
Certains germes d’origine digestive pouvant être très pathogènes pour l’homme risquent ainsi d’être retrouvés dans des pièces de découpe (collier notamment) ou dans des steaks hachés préparés avec celles-ci.
Avec l’abattage rituel, il y a donc un danger potentiel pour la santé humaine, tout particulièrement pour les enfants, les personnes âgées et les populations immunodéprimées.
« Des pratiques liées à la mise en œuvre du rituel d’abattage peuvent avoir des conséquences en termes de salubrité et de sécurité des carcasses. Nous pouvons citer à ce titre le tranchage de la trachée et de l’œsophage qui peut provoquer le déversement du contenu gastrique (voire pulmonaire) sur les viandes de têtes, de gorge et de poitrine. La pratique de la betiqua (inspection dans le rituel casher) peut avoir deux inconvénients majeurs : lorsque la betiqua est réalisée sur des carcasses au sol, la peau de l’animal peut être souillée. Ensuite, on note que la boutonnière réalisée en vue de l’inspection des viscères peut provoquer une fragilisation des attaches des viscères et un risque accru d’éviscération ratée avec souillure de la carcasse ».
Pascale DUNOYER, Chef du bureau des établissements d’abattage à la Direction Générale de l’Alimentation, « La réglementation applicable dans le domaine de l’abattage rituel », in Bulletin de l’Académie Vétérinaire de France — 2008 - Tome 161 - N°4.
Nous sommes donc loin des qualités prétendument « hygiéniques » des viandes « halal » et « casher » si souvent avancées.
« Si l’Etat doit veiller à ce que les fidèles musulmans expriment leur religion dans le respect des interdits et prescriptions alimentaires, il est aussi en droit d’imposer des restrictions aux pratiques et rites religieux qui ne seraient pas respectueuses de l’ordre public. Ainsi a-t-il le devoir d’intervenir dans les domaines de la protection animale et de la santé publique » (p. 38-39). « L’abattage rituel ne permet pas l’obtention de viandes de meilleure qualité » (p. 43).
L’absence d’information des consommateurs et ses conséquences
Dans le cadre des abattages rituels juifs, les parties arrière des animaux ne sont pas consommées. De même, après inspection de la carcasse par le sacrificateur, il se peut que l’animal soit refusé en entier.
DÈS LORS, QUE DEVIENT CETTE VIANDE PROVENANT D’ANIMAUX ÉGORGÉS SANS ÉTOURDISSEMENT PRÉALABLE ?
Elle est dirigée vers les circuits « classiques » et approvisionne boucheries, hypermarchés et restaurants sans aucune information pour le consommateur. Ce constat peut également être établi pour l’abattage rituel musulman : la consommation musulmane, principalement pour des raisons économiques, porte sur les avants et les abats. Mais une partie de la viande « halal », non achetée par les communautés musulmanes, est alors dirigée vers les circuits classiques de distribution.
LES AUTORITÉS, PLEINEMENT INFORMÉES, FERMENT LES YEUX !
Le rapport COPERCI précisait déjà, en 2005, qu’une part « non négligeable de la viande abattue rituellement est vendue dans le circuit classique, sans mention particulière ». Une enquête menée en 2005 par les Directions Départementales des Services Vétérinaires de Basse et Haute-Normandie, faisait ressortir des proportions très élevées : selon les abattoirs, jusqu’à 60% de la viande issue d’animaux abattus selon le rite musulman et plus de 70% de la viande issue du rite israélite se retrouveraient ainsi dans le circuit classique à l’insu des consommateurs !
Concrètement, il faut abattre trois animaux selon le rite religieux pour obtenir un animal qui sera effectivement dirigé vers les circuits de distribution des communautés religieuses juives et musulmanes. Les deux autres animaux abattus rituellement seront consommés par l’ensemble des consommateurs, toutes confessions confondues.
« Il est indéniable que la proportion atteinte par les mises à mort sans pré-étourdissement traduit un détournement de l’esprit des textes sur la protection animale » (p. 33).
« Les nécessités économiques auxquelles sont soumis les abatteurs font qu’une partie de la viande abattue rituellement, le plus souvent sans étourdissement pré-mortem, est consommée par des non musulmans, en général à leur insu. Cette situation pourrait rapidement être source de difficultés, au fur et à mesure que les associations de protection animale, relayées par celles de défense des consommateurs, gagneront en audience » (p. 54).
Enquête sur le champ du Halal, Comité permanent de coordination des inspections :
Inspection générale de l’Administration, Inspection générale de l’Agriculture et Conseil général vétérinaire, septembre 2005.
3Campagne nationale d’information des consommateurs citoyens sur la réalité des pratiques d’abattage des animaux I Dossier de presse 14
3Cette absence d’information du consommateur « non religieux » était confirmée en décembre 2009 par le ministre de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Pêche. Dans une réponse parlementaire, il déclarait : « il n’est pas interdit que des professionnels mettent sur le marché des viandes obtenues à partir d’animaux abattus sans étourdissement, selon un rituel religieux reconnu et réalisé conformément aux dispositions réglementaires et ce sans faire mention du mode d’abattage de ces animaux. En effet, certaines parties de la carcasse de ces animaux, voire la totalité de la carcasse, peuvent être mises dans le circuit traditionnel pour des raisons religieuses ou commerciales lorsque l’offre de certains morceaux de viande halal ou casher est supérieure à la demande »
Le Gouvernement ne semble pas vouloir remédier à cette absence d’étiquetage informatif qui constitue une grave violation de l’exercice de la liberté de conscience de nos concitoyens, garantie par les dispositions de l’article 9-2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. En effet, le 6 septembre 2010, le ministre de l’Intérieur déclarait publiquement vouloir s’opposer à toute réglementation européenne imposant l’étiquetage du mode d’abattage de la viande commercialisée.
UN ÉTIQUETAGE RÉCLAMÉ PAR TOUS
Les députés européens, le 16 juin 2010, dans le cadre de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relative à l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires, ont exigé que la viande commercialisée mentionne le mode d’abattage de l’animal (avec ou sans étourdissement).
Un tel étiquetage est d’ailleurs réclamé par la profession vétérinaire et de nombreux parlementaires français.
« Considérant que cette dérogation à l’étourdissement encadrée par des textes communautaires tend à devenir une règle générale en France, comme le souligne la Commission européenne qui précise que « le nombre d’animaux abattus selon un rite religieux dépasse très largement les besoins intérieurs des minorités religieuses concernées » ;
Considérant le manque d’information des consommateurs sur les méthodes d’abattage des animaux dont ils peuvent consommer la viande ; Les vétérinaires demandent : […] Un étiquetage informatif clair des consommateurs pour identifier la viande provenant d’animaux abattus sans étourdissement ».
Extrait de la Motion adoptée par l’assemblée des délégués lors du Congrès du S
« Après l’article L. 112-11 du code de la consommation, il est inséré un article
L. 112-12 ainsi rédigé : Art. L. 112-12. – L’étiquetage des denrées alimentaires à base de viande, que celles-ci soient préemballées, ou, à défaut, fassent l’objet d’un affichage en rayon, comporte obligatoirement, selon qu’elles respectent la directive européenne 93/119/CE du 22 décembre 1993 ou bénéficient d’une dérogation par les autorités compétentes, soit la mention : « Viande provenant d’animaux abattus après étourdissement » soit la mention :
« Viande provenant d’animaux abattus sans étourdissement ».
Article 3 de la proposition de loi n° 711 visant à limiter la production de viande provenant d’animaux abattus sans étourdissement aux strictes nécessités prévues par la réglementation européenne, déposée par M. Nicolas About et enregistrée à la présidence du Sénat, le 15
septembre 2010.
« Les raisons de cette généralisation de l’abattage sans étourdissement préalable sont essentiellement économiques. Elle permet aux abattoirs d’accéder à de nouveaux marchés, ceux de la viande casher et halal, de plus en plus lucratifs, tout en écoulant les invendus sur le marché classique.
Or cet écoulement se fait sans étiquetage particulier. Il résulte de ce phénomène un défaut d’information du consommateur qui peut, dès lors, se retrouver à consommer sans le savoir ni le vouloir des viandes abattues selon certains rites. C’est pourquoi il lui demande de préciser les mesures concrètes qui pourraient être prises afin de trouver un équilibre entre un esprit de tolérance vis-à-vis des pratiques religieuses et la nécessaire information du consommateur. »
Extrait de la question écrite déposée par M. le député Marc Le Fur à Monsieur le ministre de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Pêche, enregistrée sous le n° 90782 et publiée au JOAN du 19 octobre 2010.