14.1.13

Quand monsieur Zemmour fait de Marx un défenseur de la famille





Monsieur Zemmour, dans cette vidéo vers 9 mn 30, semble nous expliquer que Marx aurait été favorable à la famille car elle serait protectrice d'un prolétariat qui, sinon, serait déstructuré, donc plus facilement à la merci des bourgeois. (L'analyse, en elle-même, peut avoir une part de vérité, observons-le marginalement).

Les conditions d'un débat télévisé ne laissent pas le temps de vérifier si Marx a enseigné cela.

Puisque nous en avons le temps vérifions. Allons donc voir dans le Manifeste du parti communiste (1848) ce qui se dit à propos de la famille et du mariage.

« 27. Les conditions d’existence de la société ancienne sont détruites par les conditions d’existence qui sont faites au prolétariat. Le prolétaire n’a pas de propriété. Il vit avec sa femme et ses enfants dans des rapports qui n’ont plus rien de commun avec le lien de famille bourgeois. Il a perdu tout caractère national dans ce travail industriel moderne, dans cet assujettissement moderne au capital, qui est le même en Angleterre et en France, en Amérique et en Allemagne. Les lois, la morale, la religion, constituent pour lui autant de préjugés bourgeois, derrière lesquels se dissimulent autant d’intérêts bourgeois. »

Bien sûr, Marx, aveuglé par son historicisme évolutionniste, distingue la famille traditionnelle de la « famille bourgeoise », mais ce n'est évidemment pas pour revenir à la famille traditionnelle et fondée sur le sacré.

Il se peut que dans un texte, que je n'ai pas retrouvé (et dont monsieur Zemmour ne donne pas les références), Marx s'élève contre la dissolution des mœurs prônée par les libertariens. Mais il ne le fait pas parce qu'il croirait à une valeur transcendante de la famille. Il le fait pour préserver, pour des raisons conjoncturelles, la force révolutionnaire des ouvriers. Le monde de Marx (1848), n'est pas le monde de 2013. Les conjonctures ont changé.

Se défendant de vouloir abolir la famille (ce qui apparaissait comme monstrueux à l'époque), il écrit dans le même texte :


« 46. On nous dit que nous abolissons la famille ! Et les plus radicaux s’indignent de ce honteux dessein des communistes.
Sur quoi donc repose la famille actuelle, la famille bourgeoise ? Sur le capital, sur l’enrichissement privé. Elle n’existe en son plein développement que pour la bourgeoisie.
Mais elle a pour corollaire la disparition totale de la famille parmi les prolétaires, et la prostitution publique.
La famille des bourgeois disparaîtra, cela va sans dire, avec le corollaire qui la complète ; et tous deux disparaîtront avec le capital.
Nous reprochez-vous de vouloir mettre un terme à l’exploitation des enfants par les parents ? Oui ; nous faisons l’aveu de ce crime. »  

Le texte parle de "famille" sans autre précision, puis passe au terme de "famille bourgeoise" semblant vouloir distinguer les deux notions. Mais on ne peut savoir exactement ce qu'il vise dans le terme "famille". Les uns pourront croire qu'il veut préserver la famille naturelle, les autres pourront croire qu'il ne s'oppose pas à la destruction de toute famille. Je penche pour la deuxième opinion. Mais cette opinion était trop monstrueuse pour être énoncée crument à l'époque.

Marx dit en substance qu'il veut détruire la famille parce que la famille (telle qu'il la voit), c'est l'exploitation des enfants par les parents. Après cette destruction, en vertu de quoi l'humanité ne sera-t-elle pas « libre » de s'organiser en communes à 2, 3, 25, 200 (etc.) avec relations homo ou hétéro sexuelles, ou sans relation sexuelle. Comme le fait observer Benoît XVI dans Spe salvi (§ 20 et surtout 21), il ne sait pas.

Il est donc logique que des marxistes, pour lesquels rien n'est sacré, pour lesquels il n'y a pas de surnaturel, soient cohérents avec leur théorie en voulant la destruction du mariage. Car le mariage rappelle le caractère transcendant de la destinée humaine. Cela reste vrai, cohérent avec le marxisme, même si Marx n'a pas traité de la question.

Voici ce que dit Léon XIII dans Humanum genus des fondements rationnels de la justice :

« Un Dieu qui a créé le monde et qui le gouverne par sa Providence; une loi éternelle dont les prescriptions ordonnent de respecter l'ordre de la nature et défendent de le troubler; une fin dernière placée pour l'âme dans une région supérieure aux choses humaines et au-delà de cette hôtellerie terrestre; voilà les sources, voilà les principes de toute justice et honnêteté. »

Or ces vérités sont accessibles à la raison. Mais les naturalistes le nient, alors que les promoteurs des droits universels de l'homme l'affirment.

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