27.10.12

Monsieur Kerviel condamné en appel


« La cour d'appel de Paris a confirmé, le 24 octobre 2012, le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité dans l'affaire "Kerviel" des délits d'abus de confiance, faux, usage de faux, introduction frauduleuse de données dans un système de traitement automatisé.
Jérôme Kerviel est condamné à payer à la Société Générale "la somme de 4 915 610 154 euros en réparation de son préjudice direct et certain résultant des infractions intentionnelles contre les biens commises par ce dernier". La cour confirme la peine de 5 ans d'emprisonnement dont 2 ans avec sursis ainsi que l'interdiction, à titre définitif, d'exercer directement ou indirectement une ou plusieurs activités professionnelles, en l'espèce les activités d'opérateur de marché et toute activité relative aux marchés financiers.
Son avocat Me David Koubbi a annoncé qu'il formerait un pourvoi en cassation. »
Source
CA Paris, pôle 5, ch. 12, 24 oct. 2012, n° 11/00404 : JurisData n° 2012- 023684
JCP G 2012, note à paraître J. Lasserre Capdeville

La vérité judiciaire est nécessairement partielle. Ce n'est parce que d'autres n'ont pas été poursuivis qu'ils n'ont commis aucune faute. Des fautes peuvent être simplement morales, d'autres fautes peuvent être appréhendées juridiquement mais sans pouvoir revêtir de qualification pénale. Il ne faut donc pas conclure de cet arrêt plus qu'il ne dit. Surtout dans ces matières purement financières où, à la différence des fautes de violence, des fautes morales graves peuvent plus facilement ne pas être prévues par le droit pénal.

Sur cette affaire trouble, il existe deux articles de wikipedia : l'un sur "Jérome Kerviel", l'autre sur "La crise financière de janvier 2008 à la Société générale".

Il n'empêche que je ne crois pas qu'un jeune homme de 30 ans ait pu, à lui seul, générer des pertes de près de 5 000 000 000 €. On dit que cette somme s'est "évanouie", qu'elle est "partie en fumée". Mais en matière d'achat et de vente, donc de marges bénéficiaires ou de différences déficitaires, les pertes des uns font les gains des autres. Les 5 000 000 0000 € ne sont en conséquence, certainement pas perdus pour tout le monde. Des gens autres que monsieur Kerviel se sont enrichis puisqu'il paraît que monsieur Kerviel ne s'est pas enrichi. On ne sait pas qui s'est enrichi. Les faits sont présentés de telle façon que cela n'est même pas dans le débat.

Un fait attire aussi l'attention : condamner monsieur Kerviel, un jeune homme sans fortune et sans relation, lui, à 4 915 610 154 euros de dommages-intérêts découvre l'hybris du système judiciaire ainsi que son manque de sens du ridicule. Voici un extrait de l'article wikipedia sur la "Crise financière de 2008 à la Société générale"

« On sait également que la Société générale a reçu, à plusieurs reprises, des alertes d'Eurex, le marché à termeallemand, sans pour autant mettre fin aux irrégularités commises par leur trader. Le Canard enchaîné du 30 janvier 2008 fait ainsi état de trois alertes successives (en 2005, 2006 et novembre 2007). La troisième aurait selon l'hebdomadaire satirique conduit Jérôme Kerviel à justifier de la couverture de ces risques par la production d'un faux document, qui aurait suffi à rassurer les autorités chargées du contrôle26 »

On a toujours une excuse valable. Mais pour des transactions de plusieurs milliards d'euros, donner ce genre d'explications, c'est se moquer du monde. En 2005, monsieur Kerviel a 28 ans, les opérations critiquées sont donc d'environ 2004, époque où il a 27 ans… C'est un gosse… Un gosse qu'il faudrait imaginer tout seul devant son ordinateur gérant des dizaines de milliards d'euros, et pouvant tromper de hauts cadres pendant plusieurs années à l'aide d'un simple  et unique "faux document". A d'autres !

Toujours selon même article, un « concurrent » de la banque, a confié au Financial Times que ce genre de montants ne doivent être gérés que par une équipe. Ce qui est l'évidence même. Monsieur Kerviel faisait évidemment partie d'une équipe.

Encore une fois la "justice" française laisse perplexe.

Cette affaire m'évoque l'affaire Tapie. En effet, monsieur Tapie est présenté souvent comme une sorte d'escroc, alors que lorsque on lit l'article de wikipedia sur son affaire, on s'aperçoit que c'est lui qui a été escroqué. (J'ai posté sur cette affaire en 2011).

L'opinion publique est "enchantée", égarée, dans les grandes et les petites affaires. C'est une "désorientation" diabolique.

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