Lu sur le blog de Daoudal:
« Saint Augustin, traité 33 sur saint Jean, 5-7
Si le Sauveur disait: Ne lapidez pas cette adultère, il serait par là même convaincu d’injustice. S’il disait : Lapidez-la, il mentirait à sa douceur habituelle; qu’il dise donc ce qu’il doit dire pour rester doux et juste : « Que celui d’entre vous qui est sans péché lui jette la première pierre ». Voilà bien la sentence de la vraie justice. Une pécheresse doit être punie, mais pas de la main de gens qui ont la conscience souillée; la loi doit être accomplie, mais non par ceux qui la foulent eux-mêmes aux pieds. Oui, c’était la justice même qui s’exprimait par la bouche de Jésus; aussi, frappés par ces paroles comme par un trait énorme, ils se regardèrent mutuellement, et se reconnaissant coupables, « ils se retirèrent tous l’un après l’autre », et il ne resta que la misère et la miséricorde. »
D'abord j'observe que saint Augustin considère bien que l'infliction d'une peine est œuvre de justice: "Si le Sauveur disait: Ne la lapidez pas, il serait par là convaincu d'injustice". Cet élément de la justice, c'est la vindicatio. Elle est d'ailleurs juste en vertu du droit naturel (vindicatio), mais aussi en vertu du droit positif (loi de Moïse ou Torah). Les indignés avec leurs pierres aux mains ont donc raison sur ce point.
Ensuite, apparente contradiction, ce n'est pas aux hommes d'infliger des peines. Car les juges et les bourreaux sont des pécheurs, tout comme les coupables.
Mais les peines infligées par les juges sont socialement nécessaires. Les juges jouent un rôle nécessaire et par ailleurs analogue à celui de Dieu. Mais comme ils ne sont pas Dieu, ces peines ne vont pas sans la miséricorde parce qu'elles sont infligées non par des êtres parfaits, mais par des pécheurs. Dieu aurait le droit de ne pas être miséricordieux. Nous, non !
Cependant observons que la femme adultère a déjà subi des peines. D'une part la peine de sa conscience. D'autre part, la peine d'avoir été découverte et d'avoir été traînée publiquement, elle, une femme, par une foule d'hommes. La peine de se savoir à la merci d'hommes remplis d'indignation. Enfin, elle a subi la peine de l'angoisse de la mort.
C'est à mon avis une des raisons pour lesquelles Jésus ne la condamne pas. Non bis in idem. La Miséricorde voit la misère de la femme et les peines qu'elle a subies du fait de son péché. Elle voit aussi la misère des hommes remplis d'indignation. Elle voit aussi ces juifs, de véritables Israélites, qui s'humilient admirablement. Elle voit tout cela la Miséricorde.
La vindicatio est satisfaite tant pour l'adultère que pour les vengeurs. Il reste la miséricorde pour la pécheresse et les vengeurs.
C'est un des grands crimes de Nürnberg: avoir évacué la miséricorde du droit pénal. À Nürnberg, il y a d'un côté les purs, de l'autre les criminels impurs, condamnés par principe. Ce n'est plus une décision judiciaire mais par la "loi" (ou un texte à portée législative notamment l'accord du 8 août 1945) qui condamne. Il n'y a pas de miséricorde dans ces textes à valeur législative.
Or saint Paul (Rm 1,31) conclut une longue liste de vices que pratiquent ceux qui ont connu Dieu mais ne l'ont pas glorifié ni ne lui ont rendu grâce. Il conclut sa liste (sur laquelle figurent l'idolâtrie et l'homosexualité, Rm 1, 22-31) par "sine misericordia". Comme si être sans miséricorde était le comble de la misère, le comble du vice. Nous vivons sous l'empire de textes institutionnels qui proclament comme un devoir, de pratiquer le comble du vice.
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