28.2.16

Vive la liberté religieuse en matière politique !

Vu sur le Forum catholique ce texte du cardinal Kasper tiré de La Barmherzigkeit: Grundbegriff des Evangeliums - Schlüssel christlichen Lebens titre dont je propose la traduction suivante: Miséricorde: notion fondamentale de l'évangile - Clé de la vie chrétienne (édition française Le Béatitudes, avril 2015) :
« Avec ces principes, l’Eglise ne peut ni ne veut établir un programme social concret ou une sorte de politique chrétienne à partir, par exemple, de l’évangile du Sermon sur la montagne. Le Concile Vatican II a condamné ce genre d’intégralisme, qui ressemble à un totalitarisme chrétien (O. v. Nell-Breuning, art. Integralismus, in : LThK 5, 717s.), ainsi que l’idée d’un état catholique, et a toujours défendu la légitime autonomie de la politique comme de tous les autres domaines de la culture (Gaudium et Spes 36 (voir note 492)). La doctrine sociale de l’Eglise n’est pas un système abstrait, déductif, donnant des solutions toutes faites. Elle essaie plutôt de réfléchir sur les situations sociales à la lumière des fondements anthropologiques chrétiens. De ce manière elle tente, sur la base de sa compréhension de l’homme, de donner des réponses face aux défis de la situation actuelle, engendrée par l’industrialisation. »

Cette citation est plus représentative de l'intention de l'auteur de la coupure (nier la liberté) que des intentions du cardinal. L'ouvrage du cardinal semble être du plus haut intérêt, si l'on en juge par les quelques pages en libre accès.

Donc, sous réserve de la valeur d'une simple citation tirée du contexte, je ferais les remarques suivantes:

Sans référence nous ne saurons pas où le concile Vatican II aurait condamné un programme social fondé sur le Sermon sur la Montagne. Le cardinal fait probablement allusion au fait que les catholiques ne peuvent s'annexer l'Église. L'Église, en effet, n'entre pas dans les détails concrets d'un programme politique. Un parti politique ne pourrait présenter son programme comme seul déduit de l'évangile. Il doit respecter les autres partis. C'est une évidence que, à ma connaissance, nul ne conteste. Mais un parti et à sa suite un État ne pourraient-ils déclarer que l'enseignement de Rome auquel ils adhèrent est leur guide fondamental ? Qui pourrait légitimement le leur interdire ?

Un parti qui soutiendrait que sa doctrine du mariage est à demander à Rome ne peut, à mon sens, encourir aucun reproche, même ecclésiastique. C'est même une obligation universelle de confesser cette vérité.

D'autre part, l'Église ne peut interdire à un chrétien d'être en même temps un Allemand ou un Américain ou un Autrichien, ou un Chinois, ou un Français, ou un Gabonais, ou un Suisse.

Ainsi un État peut, s'il le veut, se déclarer catholique et il n'est pas au pouvoir du clergé de le lui interdire. C'est la liberté religieuse.

Il n'y a certes pas de solutions toutes faites dans les détails culturels à déduire de la doctrine sociale, mais il y a des solutions de principe. 

Par exemple, à propos du mariage, le Compendium enseigne:

« II. LE MARIAGE, FONDEMENT DE LA FAMILLE
a) La valeur du mariage
215 Le fondement de la famille réside dans la libre volonté des époux de s'unir en mariage, dans le respect des significations et des valeurs propres à cette institution, qui ne dépend pas de l'homme, mais de Dieu lui-même: « En vue du bien des époux, des enfants et aussi de la société, ce lien sacré échappe à la fantaisie de l'homme. Car Dieu lui-même est l'auteur du mariage qui possède en propre des valeurs et des fins diverses ».

Sans avoir de "solution toute faite", l'État doit écouter l'Église qui a les solutions de principe.

Aurions-nous un clergé déraciné ? On dirait que cette citation du cardinal interdise à l'auteur de rien désirer pour sa patrie. Pire, elle semble nier la liberté des patries de se proclamer catholiques. Elle semble nier que l'État doive moralement renvoyer à la doctrine catholique du mariage. Elle semble même nier qu'il en ait jusqu'à la simple liberté. Car c'est avant tout une liberté politique de renvoyer à la doctrine catholique du mariage.

Enfin un citoyen catholique doit lutter pour que sa patrie reconnaisse la royauté du Christ sur toutes les institutions laïques. 

Les catholiques n'ont-ils aucune nationalité, aucune patrie ? Se dispensent-t-ils de vouloir le meilleur pour leur patrie ? Et le règne du Christ n'est-il pas le meilleur absolument absolu pour toute société ? Leur est-il interdit d'exercer cette liberté de demander le règne politique du Christ ?

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