4.3.14

La Déclaration des droits de l'homme de 1789 interdit que la loi procède par catégories historiques

Voici ce que décide la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen qui fait partie du bloc de constitutionnalité:

[La loi] doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse. 
(Article 6 phrase 2)

La loi peut créer des catégories: les enfants, les femmes, les enfants, les riches, les pauvres, les employés, les employeurs etc. Elle peut leur octroyer des droits spéciaux fondés en raison.

Mais elle ne peut créer des catégories historiques ni d'innocents, ni de coupables.

La création de catégories historiques légales est contraire au droit pénal d'individualisation des délits et des peines ; elle est contraire à la présomption d'innocence des êtres humains. Les décisions judiciaires rendues sous l'empire de pareilles "lois" sont nulles.

L'individualisation des délits et des peines implique l'impossibilité de déclarer coupables des membres de personnes morales, de condamner pénalement des personnes morales. Le pouvoir judiciaire, et lui seul, juge des faits particuliers et de leur imputabilité à des êtres humains.

Il en est de même pour l'innocence. Une loi ne peut déclarer innocente, nécessairement innocente, une catégorie d'individus (en l'occurrence "les peuples libres" du préambule de 1946). Les juges doivent être libres de condamner ceux qu'ils jugeront coupables.

C'est pourquoi, il aurait dû être possible de condamner autant les auteurs du crime de guerre perpétré à Oradour (et ailleurs car la France fut martyrisée par les nationaux-socialistes), que les auteurs et les exécutants des bombardements des populations civiles européennes en 1940-1945.

L'histoire est tissée d'innombrables événements difficiles à établir, surtout pour les imputer en vue d'une condamnation pénale (la sanction pénale est une anomalie nécessaire). C'est pourquoi, la loi ne peut décider que des jugements ne pourront être révisés (Article 26 de l'accord de Londres). 

Toutes ces dispositions sont nulles comme contraires aux droits de l'homme.

(Mise à jour du 8 mars 2014) Autrement dit sur le caractère nécessairement abstrait des catégories pénales:

Lorsque la Déclaration des droits de l'homme déclare que la loi doit être la même pour tous, on peut dire la même chose en d'autres termes: la loi ne peut procéder par catégories concrètes, mais doit, pour rester une loi, procéder par catégories abstraites (« Dans le contrat de mariage, la femme aura droit à... »). À l'inverse, l'histoire, « l'océan de l'Histoire », fait d'événements uniques, ne s'écrit que concrètement. "Untel, dans telles circonstances, à telle époque a fait cela, ou a subi cela etc." et pas par catégories historiques.

Mise à jour du 1er avril 2014 :

Rousseau dans son système du Contrat social, tout erroné qu'ils soit (aucun contrat ne fonde la société politique, l'homme est naturellement social), a vu lui aussi le problème, à sa façon. Une loi ne peut décider ni du fait, ni du droit d'une partie:

« En effet, sitôt qu’il s’agit d’un fait ou d’un droit particulier sur un point qui n’a pas été réglé par une convention générale & antérieure, l’affaire devient contentieuse. C’est un procès où les particuliers intéressés sont une des parties et le public l’autre, mais où je ne vois ni la loi qu’il faut suivre, ni le juge qui doit prononcer. Il serait ridicule de vouloir alors s’en rapporter à une expresse décision de la volonté générale, qui ne peut être que la conclusion de l’une des parties, et qui par conséquent n’est pour l’autre qu’une volonté étrangère, particulière, portée en cette occasion à l’injustice et sujette à l’erreur. Ainsi de même qu’une volonté particulière ne peut représenter la volonté générale, la volonté générale à son tour change de nature ayant un objet particulier, et ne peut comme générale prononcer ni sur un homme ni sur un fait. »



Puisque Rousseau repose au "Panthéon", on pourrait déjà demander aux partisans de la "République du Panthéon" d'être cohérents. Leur maître à penser, lui, exige la distinction idéale et la séparation juridique entre les deux domaines.

Mais, quant au fond en distinguant avec vigueur le domaine de la décision judiciaire du domaine de la loi, Rousseau confirme que la loi ne peut décider du fait et ne peut décider de la culpabilité d'un homme physique, ni d'ailleurs de son innocence. Je ne fonderais pas cette distinction, avec laquelle je suis d'accord, sur les mêmes arguments que Rousseau. Je vois dans cette distinction plutôt la nécessité du respect du contradictoire, le respect de la présomption d'innocence, le respect de l'égalité de tous les êtres humains, donc des droits fondamentaux de l'homme.

Aucun commentaire: