27.8.10

L'abbé Normandin défenseur du droit à la liberté religieuse et à la culture

On lit sur le forum catholique un dialogue qui s'est déroulé en 1975 entre un évêque (Mgr Grégoire) et l'abbé Normandin. L'abbé Normandin était assisté de monsieur Bleau, docteur en théologie.

http://www.leforumcatholique.org/message.php?num=562942

"Mgr Grégoire – Peut-être avez-vous raison. [Ceux qui assistaient Mgr, venaient de tenter d'humilier les sources de l'abbé Normandin en les traitant par le mépris] Mais il reste que la messe de Paul VI est obligatoire. C'est ce que répondent les représentants de la Congrégation pour le Culte divin, lorsqu'on les interroge sur ce problème.

M. Bleau –
Mais la Congrégation pour le Culte divin n'a pas le pouvoir d'abroger la messe romaine traditionnelle qu'a restaurée le saint Pape Pie V. Cette messe n'étant pas, en fait, abrogée, la nouvelle messe ne peut pas être obligatoire. J'irai même plus loin : à supposer que nous nous trouvions en face d'une abrogation de la messe traditionnelle, faite en bonne et due forme par le Pape lui-même, je pense qu'on pourrait passer outre à une telle abrogation.

Mgr Grégoire – Comment ! Voulez-vous dire qu'une abrogation pontificale, faite selon les normes juridiques, pourrait demeurer sans effet ?



M. Bleau –
Parfaitement. Je m'explique. Il existe un droit liturgique des fidèles auquel on ne fait pas assez attention. […] Le pionnier du droit liturgique fut Dom Prosper Guéranger, qui a restauré en France la liturgie romaine, au siècle dernier. […] Pour illustrer le droit liturgique des fidèles, Dom Guéranger raconte comment les Milanais défendirent leur rite ambrosien: ils s'opposèrent – jusqu'à la guerre civile – à deux abrogations qu'avaient décrétées, en bonne et due forme – les souverains pontifes Nicolas II et Eugène IV. Rome, commente Dom Guéranger, sut reconnaître la légitimité de cette résistance et s'inclina devant les justes revendications des Milanais. Car il n'y a pas de jouissance plus légitime que celle de prier avec les mêmes prières et selon les mêmes rites que ses pères dans la foi."


Il est une donnée du droit naturel qui est le droit à la liberté religieuse et mise en évidence par Dignitatis humanae. Il existe un droit à la culture (Gaudium et spes).

C'est finalement sur ces deux droits naturels collectifs et individuels que se fondent le droit à prier avec les formules éditées par saint Pie V. Car le Saint Siège n'est en l'occurrence qu'un éditeur de prières, qui atteste infailliblement que ces prières sont exemptes d'erreur.

Il est intéressant de noter que les souverains pontifes ont violé le droit naturel que par ailleurs ils prêchaient. Les cours obligatoires de catéchisme pour les Juifs de Rome (qui semblent historiquement attestés), constituaient des violations du droit naturel à la liberté religieuse des Juifs.

Les papes peuvent ainsi tout en étant infaillibles en certaines circonstances, violer le droit naturel dans la pratique. Dieu a promis leur infaillibilité, mais non leur impeccabilité.

Cet extrait montre que la lettre d'accompagnement Motu proprio du 7/7/7 profère une contrevérité en prétendant, que le nouveau rite a été accepté "avec plaisir". Il a été accepté dans la croyance -fausse- que le pape pouvait interdire des formules de prières qu'un de ses prédécesseurs avait approuvées, faisant jouer son autorité disciplinaire, ou, pire, faisant jouer son infaillibilité. On joue ainsi contre l'infaillibilité vraie, au moyen d'une infaillibilité inexistante.

Le récit de l'abbé Normandin prouve que le rite a été "accepté" du fait de l'abus de pouvoir de Paul VI, qui invoquait un droit disciplinaire, là où il n'existait pas.

Plus grave, cet "avec plaisir" est le faux titre que s'est donné le pape Benoît XVI pour interdire le rite de saint Pie V (car le Motu proprio, loin d'autoriser le rite de saint Pie V, a tenté de l'interdire en s'inventant un titre qui reste contraire au droit à la liberté religieuse).

Il n'y a pas de discipline qui tienne contre le droit naturel. Il n'y a pas de discipline contre la raison.

Les graves violations des papes (et notamment de Paul VI) du droit naturel ont causé un immense scandale qui ont abouti à la destruction d'oeuvres d'art, crime contre la culture, mais aussi à l'apostasie d'un grand nombre, au schisme, à la diffusion de l'hérésie, à une profonde division dans l'Eglise.

Enfin, dernière leçon de l'aventure doctrinale de l'abbé Normandin, c'est que ce n'est pas le droit liturgique qui a fondé la résistance des Milanais, mais le droit naturel à prier comme ses ancêtres (à supposer que les formules de prières ne contiennent aucune erreur doctrinale), le droit à la culture religieuse et le droit à la liberté religieuse. Dans ce sens, Dom Guéranger est dépassé, effectivement et Naz sans doute aussi. Il faudrait intégrer à leur oeuvres Dignitatis humanae et Gaudium et spes, ces deux documents qui ont fait progresser l'esprit humain.

3 commentaires:

Unknown a dit…

Est-ce que vous êtes un paroissien de ste-irenée?

Unknown a dit…

Chère Madame de noble caractère, Non, je ne suis pas un paroissien de Saint Irénée, je ne connais pas du tout cette paroisse. Mais j'avais entendu parler de l'abbé Normandin à l'époque. Rétrospectivement, je me suis aperçu de combien ses prises de position étaient justes et conformes... à Vatican II et aux droits de l'homme.

Unknown a dit…

Relisant à plus d'une année de distance mon post de l'époque, je pense utile de préciser que le Saint Siège est une éditeur qui par son autorité peut interdire des formules de prières nouvelles et non approuvées comme l'a fait saint Pie V. Saint Pie V n'avait pas abrogé des rites, des prières que le peuple de Dieu avait approuvées il y avait plus de deux cents ans, ce qui était une garantie de l'absence d'hérésie, sans doute en raison du sensum fidelium (sentiment [commun] des fidèles) qui avait canonisé ces prières et rites, alors que les prières plus récentes avaient pu être influencées par les récentes hérésies.

http://www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/cti_documents/rc_con_cfaith_doc_20070419_un-baptised-infants_fr.html#_ftn127

Je précise également que Paul VI n'avait pas véritablement usé de son autorité, il avait prononcé un discours ambiguë (1974) d'où l'on pouvait comprendre (mais ce n'était pas littéralement dit) que le nouveau rite était obligatoire en conscience. Ce qui n'était pas vrai.