Habitant un village de montagne sur une route internationale, des voyageurs à pieds viennent parfois échouer par chez nous.
J'ai déjà pu recueillir deux pèlerins et une troupe de scouts italienne.
La dernière fois, c'était une S.D.F. portugaise qui avait tenté, selon elle, d'aller jusqu'à Jérusalem mais avait été arrêtée en Turquie où elle s'était fait détrousser (papiers dont passeport).
Les cheveux et la peau sales, dépenaillée, avec son sac à dos, fumant du tabac (mais très respectueuse du lieu, elle ne fumait que sur le balcon). Elle était touchante, car très gentille, très respectueuse et délicate pour ses hôtes.
Selon elle, elle avait donc rebroussé chemin. Elle cheminait vers Lisbonne, là où elle habitait.
Dénutrie et assoiffée, transie de froid nous l'avons fait boire et manger chaud. De ses propos dont on cherchait sans succès parfois la cohérence, j'ai retenu qu'elle avait eu 2 filles de deux mariages différents et qu'elle était divorcée deux fois, qu'elle avait connu le Mozambique...
Avec une amie, nous lui avons fourni un couchage individuel pour la nuit, au chaud.
Ensuite, nous l'avons accompagnée à l'accueil de jour, tenu par les associations humanitaires de Briançon. Elle nous avait dit vouloir se reposer un peu à Briançon pour repartir ensuite vers Lisbonne. Nous l'avons laissée là.
Quelle ne fut pas notre surprise de la voir quelques dizaines de minutes plus tard en route à pieds vers Gap. Que s'était-il passé à l'accueil de jour ? Nous ne l'avons pas su. Lui avait-on fait un reproche ? C'est possible car quelqu'un s'était proposé pour lui servir d'interprète du portugais, mais elle n'avait pas compris et n'avait rien répondu;. Ce qui avait vexé l'interprète bénévole. Ma voisine qui s'était occupée d'elle était persuadée que la SDF (Annabelle) n'avait plus le contenu du sac de provisions que nous lui avions laissé.
Quelques jours plus tard un employé de mairie m'informa qu'il l'avait vue couchée au bord de la route, encore loin de Gap. Il n'avait pu rien faire. C'était lui qui, quelques jours plus tôt, l'avait vue, perdue, par température négative, assise au pied d'un monument du village. Voyant sa détresse, il l'avait envoyée à l'église où j'étais avec le prêtre résident. Me souvenant qu'en cas de grande détresse, l'aide était justice, comme l'enseigne Léon XIII, j'avais fait ce que j'avais pu. La différence de sexe ne favorisant pas la solution du problème...
Est-elle morte ? Peut-être, peut-être des gens l'ont-ils prise en charge ? Allez savoir !. J'ai regretté
de ne pas l'avoir prise en charge plus complètement et finalement de l'avoir laissée à l'accueil de jour, où elle ne s'était pas adaptée...
Ces SDF, timides, respectueux me remplissent d'une immense sympathie. Une association privée, recense les morts de la rue. (via François Desouche). Ce recensement, sans garantie d'exhaustivité, compte 21 "morts dans la rue" depuis le 1er janvier 2016...
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