13.1.16

Dieu inconnaissable et manifesté (le rite de la messe)

Lu sur Paix liturgique cette lettre du 12 janvier 2016 (extrait):
« Abbé Claude Barthe : (…) L’abbé Tisma [prêtre chilien] vise à juste titre cette réduction du divin au simplement humain, de la foi au simplement rationnel, qui se manifeste dans la liturgie d’aujourd’hui où l’accès à la transcendance est pour ainsi dire aplati. Cette liturgie qui se veut avant tout « proche des gens » finit par ne plus les intéresser, au point qu’ils ne mettent plus les pieds à l’église. Paradoxalement, la véritable proximité qu’une liturgie bien comprise établit entre l’homme et la sainteté incandescente de Dieu, passe par le sentiment d’un éloignement absolu. Le romancier allemand Martin Mosebach exprime bien cela dans son livre La liturgie et son ennemie – L'hérésie de l'informe (Hora Decima, 2005). Le paradoxe inhérent à l’action liturgique, dit-il, est dans le fait qu’elle dévoile et révèle le mystère en l’enveloppant et en le cachant. Elle cache la présence du Dieu infini et insondable par des voiles de respect, de formes, de rites, et par le fait même, elle le révèle et fait accéder l’âme en vérité à cette présence : c’est une épiphanie qui cache pour mieux manifester.
 
La consécration, faite en langue vulgaire et sur une table placée au milieu de l’assemblée, du pain que l’on va bientôt prendre dans la main pour communier est-elle mieux comprise dans la foi que la consécration de la liturgie orientale, chantée au milieu des nuages d’encens dans la mystérieuse langue sacrée, derrière le voile qui est tombé devant la porte de l’iconostase ? Poser la question, c’est y répondre : dans le premier cas, on croit comprendre tout, et on ne comprend rien, la proximité qu’établit une liturgie banalisée rendant très difficile une véritable rencontre dans la foi ; au contraire, l’éloignement sacré qu’opère la liturgie de saint Jean Chrysostome rapproche très véritablement l’âme de Dieu. La liturgie est semblable à la ténèbre lumineuse dans laquelle Moïse a reçu la révélation divine, obscure et éclatante à la fois. Ou encore, elle est comme la « nuée lumineuse » qui « prit sous son ombre » les trois disciples témoins de la Transfiguration de leur Seigneur (Mt 17, 5). »

Je ne peux qu'approuver un tel texte. Dieu est inconnaissable. Il n'est pas l'Être des idées claires et distinctes. Cette ambition d'expliquer intégralement la liturgie pour, en quelque sorte, soumettre Dieu à notre esprit a quelque chose de ridicule et de sacrilège.

On peut lire toute l'interview de l'abbé Barthe. On ne le regrettera pas.

Aucun commentaire: