2.6.15

Traduction liturgique contre Vulgate: un exemple avec un extrait du livre de Tobie

Le haut clergé propose ou plutôt impose une "version liturgique" de la Bible. Voici un extrait de la traduction du Livre de Tobie telle que l'on peut la trouver pour aujourd'hui sur le site L'Évangile au quotidien:

Tobie chapitre 2:

Pendant ce temps-là, ma femme Anna, pour gagner sa vie, exécutait des travaux d’ouvrière, qu’elle livrait à ses patrons, et ceux-ci lui réglaient son salaire. Or, le sept du mois de Dystros, elle acheva une pièce de tissu et l’envoya à ses patrons ; ils lui réglèrent tout ce qu’ils lui devaient et, pour un repas de fête, ils lui offrirent un chevreau pris à sa mère. 
Arrivé chez moi, le chevreau se mit à bêler. J’appelai ma femme et lui dis : « D’où vient ce chevreau ? N’aurait-il pas été volé ? Rends-le à ses propriétaires. Car nous ne sommes pas autorisés à manger quoi que ce soit de volé ! » 
Elle me dit : « Mais c’est un cadeau qu’on m’a donné en plus de mon salaire ! » Je refusai de la croire, je lui dis de rendre l’animal à ses propriétaires, et je me fâchai contre ma femme à cause de cela. Alors elle me répliqua : « Qu’en est-il donc de tes aumônes ? Qu’en est-il de tes bonnes œuvres ? On voit bien maintenant ce qu’elles signifient ! » 

Si Anna, la femme de Tobie travaillait chez elle à des travaux de tissage, elle n'était pas vraiment ouvrière, mais plutôt artisane. Elle facturait à des clients.

Tobie était un saint. Il est incroyable qu'il se comporte aussi grossièrement avec sa femme.

Voici la traduction  Fillion (Vulgate) [Tobie est aveugle depuis quelques temps. Il ne peut plus travailler]:

« Tb 2,19. Mais Anne, sa femme, allait tous les jours faire de la toile, et apportait du travail de ses mains ce qu'elle pouvait gagner pour vivre.
Tb 2,20. Il arriva donc qu'ayant reçu un jour un chevreau, elle l'apporta à la maison.
Tb 2,21. Et son mari, l'ayant entendu bêler, dit: Prenez garde qu'il n'ait été dérobé; rendez-le à ses maîtres, car il ne nous est pas permis de manger ou de toucher ce qui a été dérobé.
Tb 2,22. Alors sa femme lui répondit avec colère: Il est évident que votre espérance était vaine, et voilà le résultat de vos aumônes.
Tb 2,23, C'est ainsi, et par d'autres paroles semblables, qu'elle lui insultait. »

Dans cette traduction (Fillion) Tobie ne se met pas en colère contre sa femme. Il ne se méfie pas de ce que lui dit sa femme. Il comprend, je ne sais pourquoi, peut-être l'excessive valeur du don, que le chevreau est le butin d'un vol (les voleurs "arrosent" leurs entourages pour fermer les bouches). En revanche, Anna se met en colère contre son mari parce qu'il est honnête. Elle lui dit à peu près: « Voilà où nous en sommes avec vos idées d'honnêteté et de générosité ! Nous sommes dans la gêne ! » Etc.

Dans la Vulgate voici le passage :

19 Anna vero uxor eius ibat ad textrinum opus cotidie et de labore manuum suarum victum quem consequi poterat deferebat
20 unde factum est ut hedum caprarum accipiens detulisset domi
21 cuius cum vocem balantis vir eius audisset dixit videte ne forte furtivus sit reddite eum dominis suis quia non licet nobis ex furto aliquid aut edere aut contingere
22 ad haec uxor eius irata respondit manifeste vana facta est spes tua et elemosynae tuae modo paruerunt
23 atque his et aliis huiusmodi verbis exprobrabat ei
Charlotte la petite anesse
Voici la traduction que je propose:
« 19 À la vérité Anne, sa femme, allait tous les jours tisser de la toile ; et, du travail de ses mains, rapportait ce qu'elle pouvait du nécessaire pour vivre.
20 Ce qui explique, qu'ayant reçu un chevreau, elle l'apporta à la maison.
21 Son mari entendant le chevreau bêler lui dit : « Méfiez-vous que ce chevreau ne fasse partie d'un butin. Ainsi rendez-le à son propriétaire parce qu'il ne nous est pas permis de manger ni même de toucher le fruit d'un vol. »
22 Sa femme se mit en colère et lui répondit : « Il est évident que votre espérance est vaine et qu'apparaît au grand jour la démesure de vos aumônes. » 
23 Et elle lui faisait des reproches par ces mots et par d'autres. »
La femme de Tobie l'attaque sur sa foi et son espérance.

Au lieu d'imposer ces traductions bizarres, probablement tirées de la version massorétique, laquelle est un faux selon monsieur Doaudal, les évêques, respectant la liberté religieuse, pourraient au moins signaler les différences fort importantes entre les deux versions: la traditionnelle et la moderne. Nos pères dans la foi n'étaient pas des imbéciles à qui l'on doit le mépris.

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