9.6.08

Affaire Crémel : quand l'Etat ne joue pas son rôle

Selon une dépêche de l'agence Reuters l'affaire Crémel pose la question de la récidive en matière criminelle.

L'affaire Crémel, du nom de la victime présumée de deux monstres, ne pose pas la question de la récidive des criminels, elle pose la question de la politique pénale. Car la récidive est toujours possible, l'homme étant libre, n'étant pas une machine, aucun système n'assurera jamais l'absence de récidive (sauf la peine de mort, qui n'est plus acceptée de nos jours).

La peine est faite pour être pénible. C'est la vengeance que la fédération de familles qui forment l'Etat ont déléguée à celui-ci. Si l'Etat ne venge pas, il faillit à sa mission. Il provoque la rancoeur des victimes ; il provoque parfois la violence de la justice privée dont on connaît l'illégitimité.

Or, sous l'influence du positivisme de nombreuses dispositions ont vu le jour pour "traiter" le criminel. Il ne s'agit plus alors de lui infliger une punition, mais de le "réinsérer" dans la société, de le traiter comme un malade. On fera de la psychiatrie une sorte de science humaine totale qui serait capable de changer l'être humain dont on nie la liberté. On vit sur ce principe illusoire que si l'on connaissait toutes les causes des événements on pourrait les prédire, et par conséquent changer le cours de l'injustice et du crime. Que le corollaire soit contradictoire du principe n'est pas de nature à faire reculer nos positivistes prétendument guidés par l'unique raison.

C'est comme cela que sont formés nos petits magistrats de l'École Nationale de la Magistrature, au positivisme que Benoît XVI a plusieurs fois condamné pour de nombreuses raisons.

C'est pourquoi aujourd'hui on s'apprête à rejuger un nommé Gateau qui a tué en 1984 une mère de famille. Gateau a été libéré neuf ans plus tard en 2003. Ah Gateau était un détenu modèle, obéissant, gentil, travailleur, "réinséré" à fond dans un travail régulier, consultant son psychiatre (lui qui n'est pas malade mental, ce sont les psychiatres qui l'ont dit !), comme cela lui avait été prescrit. C'était le triomphe de la politique pénale positiviste, le gentil petit Gateau. Il aimait beaucoup les bons juges avec leurs bons collaborateurs psys psys et autres.

Libéré en 2003, en 2005, une jeune femme de trente neuf ans, Madame Crémel est tuée et Gateau est soupçonné. Et lorsque le mari de madame Crémel demande, "- mais comment a-t-on pu libérer un tel monstre ?" Les juges répondent, "- c'est par manque de moyens..."

Non, ce n'est pas par manque de moyens, à moins que ce soit de moyens intellectuels et culturels.

Car, Gateau très sage, très gentil, très obéissant aurait dû rester en prison, non uniquement par prophylaxie criminelle mais également par souci de vengeance. "- Tu as tué un être humain, tu sera puni, ça va te faire mal". Et neuf ans de prison pour un assassinat, ce n'est rien car la personne tuée est toujours dans son cercueil.

"403 La peine ne sert pas uniquement à défendre l'ordre public et à garantir la sécurité des personnes: elle devient aussi un instrument pour la correction du coupable, une correction qui revêt aussi une valeur morale d'expiation quand le coupable accepte volontairement sa peine.829 "


La "valeur morale d'expiation" est non seulement valable pour le coupable, mais aussi pour la victime ou ses proches.

402 Pour protéger le bien commun, l'autorité publique légitime a le droit et le devoir d'infliger des peines proportionnées à la gravité des délits.827 L'État a la double tâche de réprimer les comportements qui portent atteinte aux droits de l'homme et aux règles fondamentales d'une société civile, ainsi que de remédier, par le biais du système des peines, au désordre causé par l'action délictueuse."


Protéger le bien commun, c'est protéger l'ensemble des conditions morales nécessaires dans une société. Le bien commun c'est l' "ensemble des conditions de vie sociale permettant à l'homme de parvenir plus pleinement et plus aisément à sa propre perfection" (dignitatis humanae)

Fait donc partie de la protection de "l'ensemble des conditions de vie sociale permettant à l'homme de parvenir plus pleinement et plus aisément à sa propre perfection", la répression, la punition des crimes. Sans cette répression, les conditions nécessaires à l'être humain pour parvenir facilement à sa perfection ne sont pas assurées, l'Etat a failli à sa mission.

Remédier au désordre par une peine, la peine pénible est donc un remède au désordre, et si elle n'est pas infligée, si elle n'est pas proportionnée à la faute, elle ne remédie plus au désordre.

Réprimer, c'est mettre en oeuvre, infliger des PEINES, des peines par nature pénibles.

Les citations sont extraites du compendium de doctrine sociale des cardinaux Nguyên Van Thuân (décédé) et du cardinal Martino. Le compendium est consultable ici

Bien évidemment, même si je cite le compendium, ce post n'engage que moi, cela va sans dire.

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