Lu ici:
« Et dès lundi matin, lors de sa messe quotidienne à Sainte-Marthe, le pape a renouvelé ses critiques contre les « docteurs de la loi » : « Pensons à la chasse aux sorcières, à sainte Jeanne d’Arc, à tant d’autres qui ont été brûlés, condamnés, parce qu’ils ne s’ajustaient pas, selon les juges, à la Parole de Dieu. »
Le pape tombe mal. La « chasse aux sorcières » fut interdite par l'Église.
Il semble que des fanatiques ou des margoulins laïcs se lançaient dans la « chasse aux sorcières ». L'Église aurait encouragé les États à punir les chasseurs de sorcières de la peine de mort.
Cette thèse est du moins celle de Wikipedia en anglais. Je ne pense pas que l'Église ait prôné la peine de mort, car l'Église a horreur du sang.
En tous cas et c'est certain, la « chasse aux sorcières » ne fut pas le fait de l'Église enseignante. C'est même elle qui la condamna.
Quant à sainte Jeanne d'Arc, certes, elle fut condamnée dans des conditions abominables. Mais le procès est encore lu et constitue même un joyau de la littérature universelle. Ce texte merveilleux est à l'honneur des femmes et des jeunes filles. Pourquoi ? Parce que la sainte a pu s'exprimer et que ses réponses furent religieusement consignées. On ne pourrait en dire autant aujourd'hui des procès devant les juges post-Nürnberg. Ils ne laissent pas les prévenus s'exprimer et leurs réponses dans la faible mesure où ils ont pu parler ne sont même pas consignées. Le greffier, aux ordres du tribunal, ne mentionne les réponses que sur ordre de la racaille, bien pire que Cauchon, qui préside l'audience.
Un exemple me vient à l'esprit.
Lors d'une audience, Cauchon eut l'idée de poser à Jeanne la question suivante:
« Êtes-vous en état de grâce ? »
Question-piège s'il en fut ! Un des juges protesta contre la question du président de l'audience. Il dit quelque chose comme "On n'a pas le droit de poser une question pareille !" Cauchon passa outre. (Verrait-on cela aujourd'hui ? Nos magistrats de 2016 ont bien trop peur pour leurs carrières. D'ailleurs, même si un juge protestait, le greffier ne le noterait pas.) Évidemment par cette question Cauchon s'immisçait dans l'intime de la conscience de la jeune fille. Il s'immisçait donc dans un domaine qui ne le regardait pas. Il ne regardait que Dieu et la jeune fille. Terrible péché que de s'introduire dans le domaine sacré, réservé à Dieu et à l'intimité de sa créature raisonnable !
Pourtant cette terrible faute fut l'occasion pour sainte Jeanne de fournir la réponse géniale suivante:
« Si j'y suis que Dieu m'y garde ! Si je n'y suis, que Dieu m'y mette ! Mais je serais la plus malheureuse des filles si je savais n'y être pas. »
Et toc ! J'imagine que Cauchon a dû se dire in petto « Flute ! Je n'aurais pas dû poser cette question. Cette sorcière m'a bien mis en boîte. Passons à la question suivante... »
Souvenons-aussi que sainte Jeanne d'Arc fit, alors que bien des témoins étaient encore viv
Déposition de la croix, détail (Fra Angelico) exposition temporaire Museo diocesano Torino. Photo de l'auteur du blog
Très belle sentence que celle de ce procès en réhabilitation du 16 juillet 1456 (assassinat de Jeanne 30 mai 1431), voici la traduction en français:
« Et néanmoins, s'il est besoin, et comme la raison l'exige, nous les cassons, supprimons et annulons, en leur ôtant toute force ; nous déclarons que ladite Jeanne et les demandeurs ses parents n'ont subi ou encouru aucune marque ou tache d'infamie en raison de ce qui a été dit, qu'elle a été innocente et qu'elle est justifiée de tout cela et, s'il est besoin, nous l'en justifions entièrement ; »
Et l'original en latin:
« Et nihilominus, quantum opus est, ratione jubente, ipsos et ipsas cassamus, irritamus et adnullamus, ac viribus omnino vacuamus ; dictamque Johannam, ac ipsos actores et parentes ejusdem, nullam notam infamiæ seu maculam, occasione præmissorum, contraxisse seu incurrisse, immunemque a præmissis et expurgalam fore et esse, declarantes, et, in quantum opus est, penitus expurgantes ; »
On pourrait chercher vainement aujourd'hui pareille honnêteté. Car, même dans les procès de condamnation de la sainte se fait jour une certaine honnêteté absente des procès contemporains. Nous sommes dans une barbarie judiciaire, bien plus terrible que n'en témoignèrent les immondes procès de condamnation du XIVe siècle.
Enfin, le pape François fait une dernière (?) erreur. Les procès de condamnation à mort n'étaient jamais des procès ecclésiastiques, mais toujours des procès laïcs. Usant de leur liberté religieuse, les sociétés laïques voulaient être catholiques et ne tolérer parmi elles aucun pollueur de la foi catholique. Certes, les condamnations à mort nous semblent aujourd'hui condamnables, voire barbares. Autre temps, autre mœurs ! Les sociétés de ces époques étaient beaucoup plus sévères en matière de droit pénal, mais bien plus juste à l'égard des fœtus, par exemple. Ne jugeons donc pas sévèrement nos ancêtres qui prenaient très au sérieux le premier commandement.
Notre pape a des côtés très sympathiques. Mais sa culture historique, assez rudimentaire, semble être constituée surtout de la mensongère littérature anti-cléricale.
Ce n'est pas la première fois que le pape parle avec une fantaisie confondante en matière historique. Déjà à propos de David, il avait fait des déclarations s'écartant substantiellement du récit biblique... Au point d'induire en erreur, selon moi, ceux qui se fient à ses discours historiques.
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