16.11.07

Entendre l'avocat d'un prévenu non comparant : un progrès.

Jusqu'alors, les avocats pouvaient représenter leur client seulement au civil. C'est-à-dire pour des litiges entre particuliers.

En revanche au pénal si l'infraction était d'une particulière gravité (!), aucun avocat ne pouvait même être entendu, et a fortiori ne pouvait représenter son client en déposant des conclusions pour forcer le tribunal à répondre (enfin, en théorie...).

L'intention du législateur était, officiellement, de faire comparaître le prévenu.

En fait on pouvait constater une sorte de pré-jugement du "prévenu" considéré comme un "pré-coupable". C'est l'esprit napoléonnien des magistrats français. Cela se traduisait par une extrême sévérité et volonté d'humilier le justiciable et l'avocat face à des magistrats dictatoriaux.

J'écris à l'imparfait, mais tout le monde aura compris que cet esprit est toujours présent. J'imagine l'avocat ayant demandé à défendre sa cliente en son absence. Comme il avait dû être reçu par les magistrats de la Cour d'Appel.

Sans doute cet avocat avait-il une cliente intelligente puisqu'il est allé jusqu'en cassation.

http://www.lexisnexis.fr/depeches/

En l'occurrence, il s'agissait de la mise en application de la nouvelle loi du 09 mars 2004, qui met en oeuvre le principe du "procès équitable" prévu par l'article 6 de la Déclaration Européenne des droits de l'homme, sanctionné par des arrêts de la Cour Européenne des Droits de l'Homme contre l'Etat français. Les magistrats, malgré la nouvelle loi avaient fait application de l'article 411 du Code de Procédure Pénale (mandat écrit obligatoire de la cliente à l'avocat) et avaient refusé de l'entendre et de prendre ses conclusions.

Par une incohérence, habituelle de la part du législateur français, la loi du 9 mars 2004 avait laissé subsister certaines dispostion de l'article 411 du Code de Procédure Pénale qui prévoyait et prévoit toujours un mandat écrit obligatoire, mais par l'article 410 al. 3 prévoyait aussi l'obligation pour le juge d'entendre l'avocat en dehors de cas limitatifs prévus par l'article 411. Aujourd'hui nous avons donc un article de loi (l'article 411), sans application. Il faudra retenir que des dispositions de loi sont injustes et inappliquées car violant les droits de l'homme, mais toujours écrites dans les textes officiels. Vous pouvez le vérifier au site legifrance, où cette disposition, ultra tarabiscotée de l'article 411 est maintenue, mais n'est plus à appliquer en vertu de l'article 410, du moins dans certains cas (attention), pour rester toujours simple !

Bref, aujourd'hui et grâce à la déclaration Européenne des Droits de l'Homme et à la Cour Européenne des droits de l'homme, la loi française est condamnée par la CEDH et la Cour de Cassation, mais personne ne le saura s'il n'a pas lu le jurisclasseur ou d'autres publications confidentielles et spécialisées. Car celui qui voudrait naïvement consulter legifrance pour connaître l'état du droit, en lisant l'article 411 comme l'avaient fait les juges des Cour d'Appel, ne le connaîtraenit pas... Et les juges français ne le lui apprendront pas.

Il paraît que la révolution aurait été faite pour rendre la loi compréhensible par tous : c'est raté. Il est même honteux et contraire aux droits de l'homme d'avoir des lois contradictoires et beaucoup trop compliquées, si bien que les magistrats ne les comprennent pas eux-mêmes.

En attendant, merci à la Cour Européenne des Droits de l'Homme et merci à la Déclaration Européenne des Droits de l'Homme, la France et les magistrats français en avaient bien besoin.

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