L’École de la Réussite ?
L’idéologie de la réussite a presque tout envahit, il faut « réussir », c’est ce que l’on inculque aux enfants.
Cette idéologie a vu le jour, paraît-il chez les « puritains » anglais : Si vous réussissez, c’est Dieu qui vous a béni. Si vous ne réussissez pas, c’est que Dieu ne vous a pas béni. Vous ne valez plus rien.
Laurent Lafforgue avec la force intellectuelle qui est la sienne, dans un article de l’Express du 28 mars 2005 épingle-t-il un des derniers avatars de cette idéologie. En effet le rapport Thélot sur l’école, « le très regrettable rapport Thélot », selon l’expression de Lafforgue, intitulé « Pour la Réussite de tous les élèves », tout un programme.
Or je conteste que la réussite soit le but de l’école et encore moins le but de la vie. La vie l’important dans la vie, c’est d’aimer et pour cela de cultiver tous ses talents, grands ou petits, brillants ou obscurs.
Lafforgue, en grand esprit, reprend les principes. « La raison d’être de l’école est d’éveiller au savoir, d’éveiller l’esprit, d’instruire. Son but premier qui fonde sa légitimité n’est pas de « faire réussir »( …) D’abord parce que ce n’est pas au pouvoir de l’école, de faire réussir, mais surtout parce « réussir » n’est pas un but dans la vie.
Oui, la « réussite » n’est pas le but premier de l’école, pas plus que de la vie, d’ailleurs. La réussite n’est pas preuve de bénédiction.
La « réussite » est une notion seulement sociale : on aura réussi si les autres jugent que vous avez réussi. Vous aurez « réussi » si vous êtes envié, si vous semblez heureux. Dans le cas particulier de l’école, la société va juger que vous avez réussi si vous avez votre diplôme, or ce qui compte dans l’étude, dans l’école, c’est de « faire sortir les enfants de leur ego, en exerçant leur raison et en les orientant vers la recherche de la vérité, qui ne dépend pas de nous. » Mais ce qui compte fondamentalement, c’est autre chose que l’opinion, changeante par nature, des autres.
Alors Lafforgue a ces puissantes expressions : L’école a pour but mais d’exercer « la raison [des] enfants », de les orienter « vers la recherche de la vérité » « en éclairant leurs esprits ». C’est autrement noble que de leur proposer la « réussite ».
Si vous proposez aux enfants la réussite, vous excluez tous ceux qui échouent de la vie, vous poussez les tricheurs à vouloir « réussir » quoiqu’il en coûte. Vous faite que les handicapés, les malades, les malchanceux seront méprisés et ce qui est le pire sans doute parce que vous tarirez la source de talents, qu’ils douteront d’eux.
Bien sûr si la « réussite » vient, ce sera tant mieux, mais l’idéologie de la réussite a trop d’inconvénients trop de conséquences néfastes pour que ne l’on ne lutte pas contre. « Réussir » n’est pas un but dans la vie.