20.10.06

Benoît XVI : Précisions et clarifications à la suite du discours de Regensburg

De l'agence Zénith, un discours du pape du jeudi 19 octobre, devant le congrès national de l'Eglise catholique à Vérone. Précisions et clarifications à la suite du discours de Regensburg (Ratisbonne) :

[quote]« Ce quatrième Congrès national est une nouvelle étape sur le chemin de la réalisation du Concile Vatican II entrepris par l'Eglise italienne », soulignait encore le pape, « un chemin d'évangélisation parcouru en étroite collaboration et en communion constante avec le Successeur de Pierre ».

Le pape décrivait la « culture dominante en Occident » en ces termes : « Seul ce qui peut être expérimenté et calculé est rationnellement valide alors que dans le domaine pratique la liberté individuelle s'érige comme une valeur fondamentale à laquelle tous les autres doivent se soumettre ».

« Dieu est ainsi exclu de la culture et de la vie publique et la foi devient plus difficile parce que nous vivons dans un monde qui se présente comme notre œuvre dans laquelle Dieu (…) semble superflu », précisait le pape.

Et par conséquent, « l'éthique est enfermée à l’intérieur des frontières du relativisme et de l'utilitarisme, où tout principe moral valide et inaliénable est exclu ».

Cette situation représente une « coupure radicale » avec les « traditions morales et religieuses de l'humanité » et ainsi, on ne peut plus établir de « dialogue » avec « les autres cultures, dans lesquelles la dimension religieuse est fortement présente ».

[/quote]

http://imp7-g19.free.fr/horde/imp/message.php?index=4617#96823

Je trouve cela mieux dit et plus explicite que le discours de Ratisbonne qui s’était muni d’un appareil d’érudition important. Cela rendait la lecture difficile. D’autant que la langue allemande est naturellement portée à l’abstraction. La langue italienne plus proche de la nôtre permet de mieux saisir la pensée du pape :

Profondamente bisognoso, perché partecipa di quella cultura che predomina in Occidente e che vorrebbe porsi come universale e autosufficiente, generando un nuovo costume di vita. Ne deriva una nuova ondata di illuminismo e di laicismo, per la quale sarebbe razionalmente valido soltanto ciò che è sperimentabile e calcolabile, mentre sul piano della prassi la libertà individuale viene eretta a valore fondamentale al quale tutti gli altri dovrebbero sottostare. Così Dio rimane escluso dalla cultura e dalla vita pubblica, e la fede in Lui diventa più difficile, anche perché viviamo in un mondo che si presenta quasi sempre come opera nostra, nel quale, per così dire, Dio non compare più direttamente, sembra divenuto superfluo ed estraneo. In stretto rapporto con tutto questo, ha luogo una radicale riduzione dell’uomo, considerato un semplice prodotto della natura, come tale non realmente libero e di per sé suscettibile di essere trattato come ogni altro animale. Si ha così un autentico capovolgimento del punto di partenza di questa cultura, che era una rivendicazione della centralità dell’uomo e della sua libertà.

Traduction proposée par moi :


[L’Italie a un besoin urgent du témoignage des chrétiens] Un besoin profond, parce que [l’Italie] participe à cette culture qui prédomine en Occident et qui voudrait se poser comme universelle et autosuffisante, générant ainsi un nouveau style de vie. Il en dérive une vague d’illuminisme et de laïcisme, pour laquelle serait seulement rationnellement valide ce qui peut être soumis à l’expérience et au calcul, pendant que sur le plan de l’éthique la liberté individuelle est érigé en valeur fondamentale à laquelle tous les autres devraient se soumettre. Ainsi Dieu demeure exclu de la culture et de la vie publique, et la foi en Lui devient plus difficile, et aussi parce que nous vivons dans un monde qui se présente comme notre œuvre dans lequel pour ainsi dire, Dieu n’apparaît plus directement, Il semble devenu superflu et étranger. En étroit rapport avec tout cela, une rapetissement radical de l’homme a lieu, vu qu’il est considéré comme un simple produit de la nature, comme tel non réellement libre et susceptible d’être considéré comme tout autre animal. Nous assistons ainsi à une véritable volte-face du point de départ de cette culture, qui était une revendication de la centralité de l’homme et de sa liberté. »

Compte rendu d'un discours tenu en Italie et en italien devant un congrès catholique.

Ou l'on voit que le discours de Regensburg était autant sinon plus dirigé contre le positivisme que contre le Duns Scot ou l'islam.

Le positivisme exclut la raison des exposés théologiques et donc de la théologie morale. Outre la fausseté de cette prise de position de principe, cela conduit à l'isolement de la culture occidentale des autres cultures. Elles ont le plus grand mal à admettre que l’on puisse s’abstraire totalement de la divinité, surtout en matière de morale et en cela elles ont raison.

Outre le positivisme le pape condamne aussi le libéralisme qui fait du principe de liberté le SEUL principe en matière morale ou religieuse. Implicitement, il réclame que les matières morales et religieuses soient aussi soumises à la norme de la raison.

Curieusement, ce libéralisme et ce positivisme pourraient être les fils intellectuels du franciscain Duns Scott, lequel prêchait, selon le pape dans son discours de Ratisbonne, un volontarisme absolu. Dieu totalement inconnaissable, même par l'analogie, selon Scott, dispose d'une volonté totalement arbitraire dont les raisons nous sont totalement inconnues.

Il est logique que si Dieu n'a pas à se conformer à la raison (il a commandé "ne tuez pas", il aurait pu commander l'inverse), l'homme qui Lui est analogue puisse se forger sa propre loi morale sans référence à la raison (donc liberté totale en matière d'éthique et de religion)

Ainsi l'excès de piété, de religiosité, l'exigence de déshellénisation de la foi, au détriment de la raison conduit au libéralisme. Il en est de même pour le rationalisme, qui désespérant de la raison en matière religieuse ou morale, les livrent à l'arbitraire de la volonté livrée à elle-même.

La vérité est ailleurs, elle est dans l'union intime de la foi et de la raison, initiée dès la traduction des Septantes par les savants juifs d'Égypte du troisième siècle avant Jésus-Christ et qui perdure jusqu'à aujourd'hui dans la théologie catholique.

Le pape nous invite donc renouer les liens entre foi et raison théologie et philosophie, morale et raison, morale et théologie.

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