5.5.06

1er juillet 2006 : des actions qui étaient possibles cesseront de l’être. Notamment les action en annulation de reconnaissance par le père

Le nouveau régime du délai pour contester une reconnaissance. L’auteur de la reconnaissance pourra-t-il encore contester sa reconnaissance : pas évident.

L’ancien article 339 du Code Civil prévoyait que la reconnaissance pouvait être contestée pendant dix ans par toute personne y ayant intérêt, même par son auteur. Il prévoyait que si la possession d’état avait duré dix ans et que cette possession d’état (en gros l’apparence de la réalité de la filiation) était conforme à la reconnaissance, ladite reconnaissance ne pouvait plus être contestée que par l’autre parent, par l’enfant lui-même ou de ceux qui se prétendent les parents véritables. Donc l’auteur de la reconnaissance n’avait que dix ans de la reconnaissance si l’enfant avait eu la possession d’état d’enfant de l’auteur de la reconnaissance.

En revanche l’autre parent, l’enfant lui-même et ceux qui se prétendaient le véritable parent pouvaient contester pendant trente ans et l’enfant donc pendant trente ans comptés de sa majorité.

Cet ancien article 339 est officiellement abrogé par l’ordonnance entrant en vigueur au 1er juillet 2006.

Donc, il faut se retourner vers le droit commun. L’action classique en annulation de reconnaissance quel régime suit-elle ?

A compter du 1er juillet 2006 le délai est réduit à dix ans, et dix ans de la majorité de l’enfant pour les actions d’état, mais le nouvel article 334 dispose que « A défaut de possession d’état conforme au titre, l’action en contestation [de la filiation] peut être engagée par toute personne qui y a intérêt dans le délai prévu à l’article 321 », soit dix ans à compter de la privation ou du commencement de la jouissance de la possession d’état, avec un exception pour l’enfant soit vingt-huit ans puisqu’il ne peut agir lui-même pendant sa minorité.

L’article 333 nouveau prévoit que « nul ne peut contester la filiation lorsque la possession d’état conforme au titre a duré au moins cinq ans depuis la naissance ou la reconnaissance, si elle a été faite ultérieurement. »

Ce qui semble vouloir dire, en langage plus clair que si la reconnaissance a eu lieu et que l’enfant est traité comme l’enfant du parent qui l’a reconnu (il porte son nom, le parent l’entretien, il est considéré comme tel par l’entourage etc.), donc dans le cas de ces conditions cumulatives ont duré cinq ans, plus personne ne pourra contester la reconnaissance.

Avis aux maris ou amants complaisants qui ont reconnu l’enfant : ils n’auront plus que dix ans dans le cas où ils n’auraient pas traité l’enfant comme leur enfant, mais plus que cinq ans s’ils l’ont traité comme tel à compter du temps où ils auraient cessé de le faire, si ce traitement a duré moins de cinq ans. Et encore on peut se demander s’ils auront véritablement une action puisque cette action est réservée à l’un de ses père et mère ou celui qui se prétend le parent véritable. Or si l’auteur de la reconnaissance conteste sa reconnaissance, il faudra bien qu’il dise qu’il n’est pas le père, ce qui risque de rendre son action irrecevable : la jurisprudence tranchera.

En tout cas, ces dispositions risquent de causer bien des drames par leurs rigidités. Parfois l’enfant prétendu peut avoir intérêt, même affectivement à faire reconnaître son « vrai » père, par souci de vérité. L’action risque de devenir irrecevable, de même pour le prétendu père ou la mère qui ne voudra plus d’un homme dans sa vie même indirectement.

La liberté se rétrécit encore, au profit de la dictature judiciaire et technocratique. Protéger l’enfant, bien sûr, contre les variations préjudiciables de filiation, mais imposer aux familles des liens dont elles ne veulent plus, cela a quelque chose de totalitaire.

Le langage se fait obscur. Je reviendrai sur la question en postant sur l’aspect historique de la filiation, quelle clarté Cambacérès, quelle obscurité nos technocrates.

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