31.5.16

Mgr Livi donne une leçon sur la confession et le for interne

Commentant ce passage de Amoris lætitia, Mgr Livi en commente le paragraphe 304 :

Traduction de l'original italien que je corrige personnellement ainsi :
« 304. C'est faire preuve d'un esprit borné que de se limiter à considérer si l’agir d’une personne répond entièrement ou non à une loi ou à une norme générale, car cela ne suffit pas pour discerner une pleine fidélité à Dieu dans l'existence concrète d'un être humain et d'en être assuré. » (1)
Le document poursuit ensuite en faisant remarquer que la règle générale ne permet pas toujours de juger des cas particuliers. Il conclut le paragraphe en faisant soigneusement observer que la solution pratique d'un cas ne doit pas être élevée au niveau de norme générale. La norme générale garde sa valeur.

Mais à aucun moment François ne parle de la conscience. Il s'agit toujours, au moins dans cet extrait, de jugement externe, du jugement du confesseur.

Voici le commentaire de Mgr Livi:

« Qui il discorso è ancora più ambiguo, perché confonde volutamente la valutazione “esterna” della situazione morale di un fedele dalla conoscenza della sua situazione “interna” davanti a Dio: la condizione di coscienza dell’individuo sfugge all’occhio umano, anche a quello del direttore spirituale o del confessore, e l’autorità della Chiesa non è chiamata a dare giudizi sulla coscienza («de internis neque Ecclesia iudicat»). »


Ce que je propose de traduire:

"Ici le discours est encore plus ambigüe, car il confond volontairement l'appréciation "externe" de la situation morale d'un fidèle et la connaissance de la situation "interne" devant Dieu: la situation de la conscience de l'individu échappe au regard humain, même à celui du directeur de conscience ou du confesseur, et l'autorité de l'Église n'a pas vocation à rendre des jugements sur la conscience (« de l'intérieur, même l'Église ne juge pas » (2)

Le fidèle juge légitimement sa propre conscience d'une manière infaillible mais peut, objectivement, se tromper, même de bonne foi. Il peut se tromper sur, par exemple, la norme objective (méconnaissance, ignorance etc.) Seul Dieu juge sans se tromper.

À mon avis la critique de Mgr Livi est inopérante car le pape François n'a pas dit que le prêtre pouvait juger la conscience, mais seulement que l'appréciation d'un acte conforme (et pas non-conforme) à la règle objective ne suffisait pas à juger de la pleine fidélité du pénitent à Dieu dans l'existence concrète.

Ce texte peut être jugé comme l'expression du jésuitisme, d'une complication de pensée qui ne fait que désorienter. On dirait un jeu intellectuel... destiné à ridiculiser les lecteurs pressés.

Cependant, même inopérant sur le texte de François, le texte de Mgr Livi garde son intérêt car il permet de mieux saisir le rôle du confesseur et de se remémorer le principe fondamental de l'impénétrabilité de la conscience. Principe nécessaire au droit pénal et… à la vie de tous les jours.

Mais d'autre part:

Le texte de François fait comprendre aux confesseurs qu'il leur faut être très prudents et ne pas juger hâtivement. Par exemple ne pas aller à la messe le dimanche est un péché mortel. Mais dans la pratique, il faudra discerner si la faute est imputable. J'ai dans la tête l'exemple d'une cousine de mon père qui fut dégoûtée de la religion parce qu'un prêtre, à qui elle avait confessé ne pas être allée à la messe le dimanche, lui avait refusé l'absolution. Elle cessa dès lors et définitivement toute pratique. Alors que, orpheline et vivant dans une famille non-pratiquante, le prêtre aurait pu juger, selon moi, qu'elle ne pouvait faire autrement que de ne pas aller à la messe. Il aurait pu au lieu de l'enfermer dans l'angoisse, la rassurer... et lui montrer qu'il n'y avait pas péché, vu sa situation... (Ce cas concerne une loi positive. Il n'en serait pas de même d'une règle négative de droit naturel. Par exemple "tu ne tueras point." ou "tu ne commettras pas l'adultère". Ces règles sont absolues et ne souffrent aucune exception. Cependant pour l'adultère il peut se produire que, dans un cas concret, une situation jugée adultère par le public ou par le prêtre ne le soit pas en réalité. Ce qui ne doit pas être confondu avec une "morale de situation". Cela peut se produire aussi pour l'homicide: cas de légitime défense.)

(1)  La traduction officielle est très défectueuse.

(2) en latin dans le texte

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