16.11.14

Libertas et Dignitatis humanæ

Ceux, qu'ils soient "progressistes" ou "traditionalistes", qui s'intéressent à la question soulignent l'opposition qui existerait, entre, d'une part l'encyclique Libertas de Léon XIII (20 juin 1888) et la déclaration Dignitatis humanæ (7 décembre 1965).

Les citations que je vais faire semblent signer le désaccord entre les deux textes mais signent en réalité leur accord.

Extrait de Libertas:

« De ces considérations, il résulte donc qu'il n'est aucunement permis de demander, de défendre ou d'accorder sans discernement [souligné par moi] la liberté de la pensée, de la presse, de l'enseignement, des religions, comme autant de droits que la nature a conférés à l'homme. Si vraiment la nature les avait conférés, on aurait le droit de se soustraire à la souveraineté de Dieu, et nulle loi ne pourrait modérer la liberté humaine. »

En italien :

« Da quanto si è detto consegue che non è assolutamente lecito invocare, difendere, concedere una ibrida libertà (…) » 

Ce je traduis: « De ce qui précède il résulte qu'il n'est pas absolument licite d'invoquer, défendre, concéder une hétérogène liberté [des religions] »

En anglais

« 42. From what has been said it follows that it is quite unlawful to demand, to defend, or to grant unconditional freedom (…) ». 

En anglais ce qu'il est illicite de revendiquer comme un droit naturel c'est une liberté inconditionnelle.

En espagnol, le traducteur a complètement passé sous silence l'expression "sans discernement", "ambigüe",  "hétérogène", ou "inconditionnelle"... Pour les hispanophones, la liberté des religions devient absolument illicite... Méfions-nous donc des traductions...

Mais, sauve la faute de traduction espagnole, Libertas n'interdit pas de réclamer ces libertés comme des droits conférés par la nature, mais il demande de le faire avec discernement. Il faut discerner la liberté absolue, libérale, de la liberté insérée dans un ordre, liberté valable.

Dignitatis humanæ confesse la même doctrine:

« Or, puisque la liberté religieuse, que revendique l’homme dans l’accomplissement de son devoir de rendre un culte à Dieu, concerne l’exemption de contrainte dans la société civile, elle ne porte aucun préjudice à la doctrine catholique traditionnelle au sujet du devoir moral de l’homme et des sociétés à l’égard de la vraie religion et de l’unique Église du Christ. »
« [l']exercice [de la liberté religieuse] ne peut être entravé, dès lors que demeure sauf un ordre public juste. »

Dignitatis humanæ précise que le devoir des individus et des sociétés à l'égard de la vraie religion et de l'Église est moral (donc susceptible de ne pas être toujours traduit dans la loi civile, et s'il y est traduit, d'y être traduit en tant que liberté du peuple). Ce n'était sans doute pas assez précisé dans Libertas. Elle précise en outre que, juridiquement, la liberté religieuse est un droit conféré par Dieu à tout homme et que ce droit s'insère dans l'ordre public. L'ordre public, c'est avant tout l'affirmation des valeurs de vérité,  justice, droits de l'homme.

Dès lors, la liberté religieuse disparaît lorsque elle est un prétexte à violer la vérité et la justice.

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